Quelles ont été vos meilleures rencontres à la Villa Kujoyama ?

Krikor Kouchian – Nous étions unis dans la même énergie créatrice. La résidence a été l’occasion d’échanger et d’avancer ensemble, je pense que ce n’est pas toujours le cas dans ce type de contexte. La rencontre avec les équipes et la direction de la Villa a également été une très agréable surprise. Une autre rencontre a été le lieu lui-même : la Villa et la forêt qui l’entoure m’ont profondément inspirée. Il y a eu aussi la rencontre terrifiante avec le mukade (mille-pattes japonais, ndlr), on en a tous fait des cauchemars !

Céline Pelcé – Les gagnants, les habitants du quotidien, avec qui il y a eu beaucoup d’échanges. Le professeur de cérémonie du thé, Dairik Amae, m’a initié à cet art et je continue à dialoguer avec lui, Yuki Hagino, pâtissier spécialisé dans les plantes sauvages et les écosystèmes ruraux…

Flore Falcinelli – Il y a eu des réunions à l’intérieur et à l’extérieur. A la Villa, j’ai eu une collaboration très fructueuse avec Céline Pelcé : nous avions des préoccupations communes, et elle les a réunis dans un repas de jardin anthropocentrique : les invités devaient jardiner, creuser la terre pour trouver des objets et de la nourriture… Dehors, je Je citerai le céramiste Ikoma Keiko, avec qui je prends des cours sans langue commune et bien que je n’aie jamais fait de céramique auparavant. C’est un autre type de rencontre artistique, uniquement par le geste.

Alexandru Balgiu – Quant à moi, j’oriente beaucoup dans les écoles d’art en tant qu’enseignant et conférencier. Il était donc important pour moi de me sentir dans une école libre : nous avions des places et une équipe disponible, nous étions très impliqués… Au début, chacun avait une certaine discipline ; puis, nous avons développé une approche intermédiaire, qui a brouillé les frontières de ce que pouvaient être l’écriture, le design, l’expérience gustative… Nous nous sommes retrouvés dans cette énergie commune, à la frontière des disciplines.

Marcus Borja – J’ai rencontré beaucoup de monde grâce au théâtre, j’ai fait trois représentations chorales avec 30 personnes chacune. J’ai beaucoup voyagé : je suis allé dans vingt villes différentes à la recherche de sons, de voix, de goûts, de partenaires… Il serait impossible d’en choisir une seule. Mon travail est lié à la polyphonie, donc ma meilleure rencontre a été avec le pays dans toute sa diversité.

La résidence favorise-t-elle les collaborations ? Quelle était la vôtre ?

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Krikor Kouchian – Même si les artistes sont généralement assez seuls, il y a eu beaucoup de collaborations lors de la saison 2021. D’une certaine manière, nous étions isolés mais ensemble. Cela peut sembler incohérent, mais je pense que les deux semaines seuls que nous avons dû faire à notre arrivée ont été une belle opportunité, cela nous a rapprochés et nous a permis d’apprivoiser les lieux. J’ai fait deux collaborations avec d’autres artistes, des performances mêlant nos disciplines : d’abord, avec Alexandru Balgiu, nous avons combiné poésie sonore, musique ambiante, estampes Riso et vidéo. Puis, avec Céline Pelcé et le chef Kotomi Matsumoto, nous avons organisé un dîner extra sensuel.

Flore Falcinelli – Si la résidence favorise la singularité de chaque projet, pour moi qui souhaitais travailler ensemble, j’avais tous les moyens. De manière pratique, nous pouvons recevoir des artistes à l’intérieur de la Villa pour faire des collaborations : nous avons des espaces de rencontre, des espaces de travail et des espaces intimistes, ainsi que de nombreux espaces extérieurs qui permettent de multiplier les pratiques plastiques. On vit tous ensemble, les studios ont la même configuration, il y a une interdépendance des expériences : donc les projets sont très vite utilisés.

Marcus Borja – Avec Céline Pelcé, nous avons prévu une performance multisensorielle entre cinéma, concert et performance culinaire, appelée Dérive nocturne et qui était une véritable œuvre à quatre mains. L’idée est venue de mon projet Note di note. Notes du soir : Céline voulait concevoir un menu interactif avec ce film. J’ai donc rejoint ce projet avec mon film et ma pratique musicale, et Céline avec sa pratique d’artiste culinaire.

Céline Pelcé – La résidence favorise la collaboration dans le sens où les relations s’établissent au-delà d’une rencontre purement professionnelle. Il y a aussi le quotidien, les échanges entre deux portes, les rencontres impromptues, etc. Pour ma part, j’ai collaboré avec de nombreux lauréats de la Villa, invitant à chaque fois un collaborateur du Japon à se joindre au projet, pour combiner découvertes et concepts. C’était passionné !

Alexandru Balgiu – Il ne faut pas voir la période de résidence comme une fin : il est important de voir ce qu’elle nous apporte sur une longue durée, et le temps du séjour est très rapide. C’est une invitation à aller plus loin, à poursuivre la conversation.