Le Dr Jérôme Barrière, le Dr Pierre-Marie Tardieux et le Pr Jacques Levraut, ainsi que 22 autres soignants, alertent sur la situation des urgences à l’hôpital et proposent des solutions à trouver ensemble.

Voici leur tribune : « La question de la continuité et de la permanence des soins est au cœur de l’expression des responsables politiques, administratifs et médicaux également dans un contexte plus que jamais à grand risque de rupture, dans les services d’accueil d’urgence. (UAS). Tout cela s’inscrit dans une évolution sociétale rapide en termes d’accès aux soins et de recrutement de plus en plus difficile quelles que soient les catégories professionnelles. Les sources du mal sont multiples : des équipes émaciées avec un déficit démographique en personnel médical spécialisé (urgentistes, médecine générale) mais aussi en personnel paramédical et surtout, désormais, la difficile acceptabilité du stress constant du travail jour et nuit.

Les SAMU sont des piliers de notre système de santé qu’il faut préserver à tout prix

En cas d’obligation, et en raison de la difficulté de la permanence de ces soins, les trois quarts des praticiens hospitaliers seraient prêts à quitter l’hôpital d’ici cinq ans. Chaque établissement de santé, public ou privé, doit aujourd’hui répondre au formidable triptyque d’une juste rémunération, d’une offre de respect et de reconnaissance au travail et de conditions de travail acceptables pour l’ensemble de son personnel. En raison de l’absence de l’un de ces trois points, l’agent n’est pas invité à décourager et à rechercher des structures ou des méthodes d’exercice plus rentables, ou un environnement d’exercice plus précieux et plus favorable à l’exercice. du stress destructeur. Sinon, vous courez le risque d’une « résilience imposée » au travail, qui conduit à une démotivation progressive puis au fameux burnout.

Ensemble, nous devons envisager des solutions structurelles immédiates mais aussi à long terme pour aboutir à des changements concrets et réalistes, mais qui seront également acceptés par tous les professionnels de santé. C’est notre devoir de membres et d’élus des sociétés savantes et des commissions médicales des établissements de santé publics et privés (CME). La gestion de la crise du Covid nous a appris que la coordination et la collaboration interinstitutionnelles sont possibles, transcendant les vieux clivages partisans « public-privé ».

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Les SAU sont des piliers de notre système de santé qu’il faut préserver à tout prix car ils sont capables de répondre en permanence aux besoins de soins non programmés de l’aire de santé. A l’instar des îles Canaries utilisées autrefois dans les mines, leur essoufflement actuel est le stigmate du grisou dont le conflit menace désormais tout le système de santé. La saturation du SAU est l’effet combiné d’un flux incontrôlé de patients entrants et sortants qui a ralenti l’énorme difficulté d’amener les patients qui en ont besoin à l’hôpital.

Au-delà des conditions d’accueil indignes de nos patients, cette saturation des urgences est loin d’être anodine d’un point de vue sanitaire. De nombreuses publications montrent que la saturation des urgences est bien à l’origine d’une augmentation de la morbi-mortalité chez les patients stagnants sur civière. C’est un peu le problème général de l’explosion des urgences dans toute la France, c’est un peu la « discussion » de tous nos personnels qui ne veulent plus venir travailler, c’est un peu la « discussion » des familles des malades. et nos patients qui ne comprennent pas ces services d’urgence redondants.

La fermeture de cette SAU entraîne également une perturbation du système et une concurrence déloyale entre les établissements publics et privés.

Une partie de ce manque d’attractivité signifie aussi que nous sommes à -30% de nos objectifs d’effectifs et que nous nous appuyons toujours sur les mêmes personnes chaque matin en les suppliant de faire des heures supplémentaires. C’est un peu comme tous nos médecins, nos ambulanciers qui n’en peuvent plus, n’arrêtent pas, mais c’est tous les patients qui nous remercient de ne pas s’arrêter et de fermer « la porte ». Car, oui, effectivement ces conditions de travail dégradées sont à la base de la fuite du personnel et contribuent à la fermeture ponctuelle de la SAU, même pour une longue période.

La fermeture de cette SAU entraîne également une perturbation du système et une concurrence déloyale entre établissements publics et privés pour combler les « trous de planification » médicaux et paramédicaux. Pour éviter certaines fermetures inéluctables, 24 heures de soins médicaux sont payées cinq à dix fois plus que celles des médecins titulaires investis dans leur service pour le même travail. Le service de nuit en tant que médecin pompier pourrait être exonéré d’impôt lorsque rien n’est encore en place à l’hôpital, qui perd de son attrait d’année en année, ou en service libéral lorsque des actions ont récemment été dévalorisées. Ensuite, il y a des modes d’exercice moins intenses et donc plus attractifs, sans garde de nuit, avec l’apparition de cabinets médicaux aux horaires longs, sans le soutien des établissements de santé, certes très utiles surtout après réorientation, mais fermés après après 22h à minuit, et donc sans obligation de soins continus. On ne peut pas continuer comme ça.

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Parce que les causes sont bien multifactorielles, les solutions ne peuvent pas être uniques. Concernant l’amont d’abord. De nombreux usagers se rendent aux urgences par manque d’accès à un médecin généraliste (près de 5 millions de Français ne l’ont pas déclaré), mais aussi par méconnaissance de l’organisation de notre système de santé et de la multiplicité de ses offres de soins. comme l’accès à une simple téléconsultation et la possibilité de recevoir un avis médical. C’est pourquoi nos Agences Régionales de Santé (ARS) vont diffuser des campagnes de communication et de sensibilisation, à contacter le 15 avant de se rendre aux urgences. De plus, la mise en place de services d’accès aux soins (SAS) en lien étroit avec les SAMU facilitera cette réponse aux besoins des patients. Le développement des systèmes d’accompagnement coordonnés (DAC) et des communautés territoriales de santé (CPTS) facilitera la prise en charge des patients complexes et/ou porteurs de maladies chroniques pour lesquels la méthode d’exercices isolés n’est plus adaptée et entraîne trop souvent une admission systématique aux urgences. Il faudra aussi penser rapidement à une vraie médecine sur les EGPAD et à la présence de personnel soignant en continu, notamment pour les patients les plus dépendants.

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Il est urgent de garantir la gestion continue des lits disponibles au sein des établissements

Concernant le flux alors. Retrouver, le matin, 20, 30 ou 40 patients sur des civières, sans intimité, dans des couloirs, en attente d’un lit d’hôpital, que le soignant perdrait l’estime de soi et ressentirait « anodin » l’inacceptable. . Beaucoup d’entre nous ne l’acceptons plus et décidons d’arrêter. Il n’est pas acceptable que des médecins ou des infirmières passent deux ou trois heures au téléphone pour trouver un lit de secours qui éloigne des soins essentiels. Il est urgent de garantir que les lits disponibles au sein des établissements seront gérés en continu et qu’il sera possible d’adapter sa capacité au flux d’activité. C’est aussi dans la gestion des lits (ou « bed management ») que la collaboration inter-établissements, au sein d’une aire de santé, pourrait être immédiatement effective.

Cette adaptabilité territoriale a été couronnée de succès lors des différentes vagues Covid. Celle-ci doit être réactivée immédiatement pour faire face aux périodes de haute tension cet été. Les divisions doivent à nouveau disparaître. Il faut militer pour la remise en forme en mutualisant les lits chirurgicaux et médicaux, qui doivent pouvoir faire des lits polyvalents en fonction de la demande. Il existe une spécialisation en médecine générale mais encore peu d’internes la choisissent. Aujourd’hui, le concept de service spécialisé facilite certes la promotion universitaire, mais il est maintenant trop éloigné des besoins de soins de proximité polyvalents. Des unités mobiles au sein et entre les établissements doivent également être développées, pour enfin dégrouper les spécialités et amener les spécialistes au chevet du patient. C’est ce qui a déjà été mis en place dans de nombreux établissements publics comme les Centres Hospitaliers Intercommunaux ou les établissements privés, et c’est un succès et il est moins soucieux de trouver des lits en aval pour le personnel de sa SAU. Dans le cas des CHU, des plateformes de lits partagés à orientation thématique médicale doivent être mises en place. Et enfin, et c’est la clé de base qui permet un « turnover » optimal des lits de court séjour, il faut aussi renforcer les filières aval après les hospitalisations, les soins de suite et de réadaptation (SSR), l’hospitalisation à domicile (HAD) . en tant que prestataire de soins à domicile, tout cela pour obtenir le meilleur résultat de la ville.

Tous ces défis à court et moyen termes sont immenses et nécessaires. La volonté des professionnels de santé est toujours là et sera toujours là et ils sont sources de recommandations. Qu’ils seront entendus et qu’ils seront impliqués dans les décisions critiques concernant le développement de notre système de santé. »

Les signataires : 

Dr Jérôme Barrière, Président de la Commission Médicale d’Etablissement (CME). Centre de santé Saint-Jean. Cagnes sur mer.

Pierre-Marie Tardieux, praticien urgentiste hospitalier. Chef du service des urgences. CHU de Nice

Pr Jacques Levraut, Professeur des Universités – Praticien Hospitalier. Chef du service de médecine d’urgence du CHU de Nice. Président de la Commission Médicale d’Etablissement (CME) du CHU de Nice

Dr Julie Contenti, chef du service de médecine d’urgence du CHU. CHU de Nice

Pr Nicolas Peschanski, Maître de conférences en médecine d’urgence. Praticien hospitalier. CHU de Rennes

Dr Muriel Jourdan, présidente de la commission médicale de l’établissement. Centre Hospitalier Privé Les Sources. Agréable

Dr Fréderic Braccini, Président de la commission médicale fondatrice. Clinique Saint-François. Agréable

Dr Isabelle Béréder, vice-présidente de la Commission de médecine de base. CHU de Nice.

Dr Gaëlle Ranchou, présidente de la commission médicale fondatrice. CH de Périgueux,

Dr Nicolas Perolat, médecin, Urgences/SMUR, CH de Troyes

Dr Abbo Lorenzo, Président de la commission médicale d’établissement. CH de Menton

Dr Benjamin Verrières, Président de la commission médicale de l’établissement. CH d’Antibes

Dr Dominique Lanvin, Président de la commission médicale d’établissement. Hôpital privé de Tzanck. Mougins

Dr Olivier Gastaud, Président de la commission médicale de l’établissement. Clinique du Parc Impérial. Agréable

Dr Abdo Khoury. Docteur urgentiste. CHU de Besançon. Président de la Société européenne de médecine d’urgence (EUSEM)

Dr Sébastien Novellas, Président de la commission médicale de l’établissement. Institut Arnault Tzanck. Saint-Laurent-du-Var

Dr Sébastien Pouzoulet, Praticien Hospitalier, SAMU-Urgent. CH d’Albi.

Pr Saïd Laribi, Faculté de Médecine des Voyages, Chef d’Unité, Unité Inter-Hospitalière Urgences-Médecine Légale. Visites de l’hôpital universitaire.

Dr Philippe Camarassa, Président de la commission médicale de l’établissement. Institut Arnault Tzanck Unité de chirurgie cardiaque. Saint-Laurent-du-Var

Dr Frédéric Colomb. Président de la commission médicale de l’établissement. CH de Grasaigh

Dr Christophe Gard, Président de la commission médicale fondatrice. CH de Cannes

Dr Babou Karimdjee. Vice-président de la Commission Médicale Instituée. Centre de santé Saint-Jean. Cagnes sur mer.

Dr Nicolas Albin, vice-président de la commission médicale de l’établissement. Groupe Hospitalier Mutuel de Grenoble

Dr Amandine Forestier, vice-présidente de la commission médicale d’établissement. Groupe Hospitalier Mutuel de Grenoble

Dr Stéphane Vinzio – ancien président de la commission médicale d’établissement. Groupe Hospitalier Mutuel de Grenoble