A La Foux d’Allos, dans les Alpes-de-Haute-Provence, le 28 décembre, au Col du Lautaret, dans les Hautes-Alpes, le même jour, et en Savoie, à Bonneval-sur-Arc, le 30 décembre. En début de saison, des avalanches se déclenchent partout dans divers massifs français. Des avalanches, mais aussi des glissements de terrain, comme cela s’est produit le 1er janvier 2022, à Saint-Gervais, en Savoie. Malgré ce phénomène naturel, des milliers de touristes français et étrangers redécouvrent cette année les joies de la montagne et du ski après la berne de la saison précédente. Alors, pour concilier ces deux facteurs et faire en sorte que la montagne reste un terrain de jeu sûr pour tous, il y a quelques bons réflexes à retenir et quelques règles à respecter. Pour les connaître et mieux comprendre le phénomène de la montagne à cette époque, nous sommes allés voir le commandant du peloton de gendarmerie de haute montagne (PGHM) de Briançon.
Ces derniers jours, et plus particulièrement au moment du réveillon, plusieurs accidents ont eu lieu à cause d’avalanches ou d’éboulements, à quoi cela est-il dû ?
Nous avons des conditions météorologiques qui suscitent des inquiétudes en termes de nivologie (l’étude de la neige et des avalanches). Ceci est provoqué par le phénomène d’une chute de neige assez importante fin décembre, au début de la semaine du nouvel an, puis à la limite des chutes de neige qui sont progressivement montées à des niveaux très élevés. La pluie est tombée à près de 3 000 m d’altitude et cela a pesé lourdement sur l’amas de neige, provoquant ce qu’on appelle une forte avalanche. C’est le risque le plus important avec ce dégel qui dure plusieurs jours et avec des ISO 0°C, (niveau de température 0) qui montent à près de 4 000 m. Après cela, le dégel pendant la période de Noël, avec la formation d’un anticyclone, est encore quelque chose qui arrive assez souvent.
En dehors des avalanches, est-ce que la hausse des températures peut générer d’autres risques ?
La fonte et la pluie ont fortement inondé l’amas de neige et, à certains endroits, en particulier sur les pentes ensoleillées, les niveaux de neige ont considérablement baissé, avec un risque d’exposition de gravier ou de roche. C’est pourquoi nous vous recommandons vivement de porter un casque, même lorsque vous partez en randonnée à ski, car les rochers ne sont jamais très loin à cet endroit, du moins en ce qui concerne le département des Hautes-Pyrénées.
De manière générale, quels sont les conseils à suivre pour profiter de la montagne en toute sécurité ?
Pour s’initier au ski alpin, il faut respecter les 10 règles des skieurs, comme la règle de priorité, toujours contrôler sa trajectoire et sa vitesse et, bien sûr, nous vous recommandons également de porter un casque sur les pistes lorsque vous skiez.
Pour les piétons, qu’ils soient à ski ou à pied, les premières règles de sécurité concernent l’équipement et le transport systématique du triptyque dit de sécurité. Il se compose d’un détecteur de blessés par avalanche (DVA), d’une pelle et d’une sonde. C’est un outil qui va permettre l’auto-sauvetage, c’est-à-dire le sauvetage en groupe si quelqu’un se fait prendre dans une avalanche. Il est très important de partir en randonnée avec cet équipement. On peut ajouter des airbags, des sacs spéciaux qui permettent de « flotter » au-dessus d’une avalanche et qui ont montré des résultats assez probants depuis plusieurs années.
Et puis, le conseil le plus important est de bien choisir son itinéraire et d’évaluer les conditions météo et les conditions de terrain. C’est-à-dire choisir un itinéraire adapté au niveau de tous les participants du groupe, à la fois en distance, en altitude, en conditions d’enneigement et en conditions météorologiques. J’invite également les pratiquants à ne pas hésiter à se rapprocher des professionnels de la montagne, accompagnateurs, moniteurs de ski et guides de haute montagne, selon l’activité qu’ils souhaitent pratiquer, pour être encadrés et trouver des activités en toute sécurité dans un premier temps.
Y a-t-il des signes visibles qui doivent alerter les randonneurs ou les skieurs lorsqu’ils se promènent ?
La première chose à noter est de lire au préalable le bulletin d’évaluation du risque de glissement de terrain, qui est publié quotidiennement par Météo France et qui donne des précisions sur des secteurs bien précis. Le risque d’avalanche est évalué sur une échelle de 1 à 5, avec des littéraux décrivant le risque principal pour la masse considérée selon l’orientation. Cela donne déjà une bonne indication de la stabilisation du manteau neigeux. Ensuite, il y a aussi l’analyse de terrain. Là, nous avons des signes, comme des restes d’avalanche ou des traces d’une avalanche qui vient de passer. Nous avons aussi ce que nous appelons « Wouf ». C’est le bruit qui se produit au fur et à mesure que vous progressez et que la couverture de neige diminue soudainement. Il montre une certaine fragilité. Mais le plus important, c’est un bon équipement et une bonne connaissance du terrain, et surtout, savoir échapper au temps. Cela veut dire qu’en montagne, surtout quand on skie ou qu’on se promène, il faut vraiment garder la capacité de se retourner. Il faut l’évaluer régulièrement, pour ne pas se retrouver trop loin ou incapable de descendre tout seul, soit parce que l’on est épuisé, soit parce que le terrain est devenu trop technique. C’est très important : gardez un peu de temps libre qui vous permettra de revenir en toute sécurité.
Si en dépit du respect scrupuleux de ces bons conseils, on se retrouve pris dans une avalanche, que faire pour tenter de s’en sortir ?
Il y a des réflexes qui peuvent vous sauver, mais cela dépendra du type d’avalanche, qu’il s’agisse de neige très lourde, très lente, ou de neige plus violente, qui arrive très vite. Le premier réflexe à avoir est d’essayer de s’enfuir avant d’y être piégé. Cela signifie que si vous le voyez ci-dessus, vous devriez essayer de sortir de sa ligne de coulée. Ceci s’applique également si vous êtes dans une avalanche de plaques avec un morceau de neige sur le point de tomber. Il faut essayer de skier rapidement depuis cette avalanche en passant par le côté et non en descendant. C’est vraiment le premier conseil.
La seconde consiste à déclencher votre système d’airbag si vous en avez l’équipement. Et puis, ce qu’on dit souvent, c’est qu’il faut essayer de nager dans une avalanche pour rester en surface.
Enfin, dernier point, quand tout s’arrête et si on se fait ensevelir, on essaie de dégager l’espace devant les voies respiratoires, en essayant de respirer le plus longtemps possible.
Ces prochains jours, les températures vont de nouveau baisser, avec de possibles chutes de neige, cela va-t-il entraîner de nouveaux risques pour les skieurs et les randonneurs ?
Oui, mais nous ne serons plus au même type de risque de neige. Là, ça marche par le soleil, en quelques jours ensoleillés, mais s’il y a de la neige, on privilégiera la neige fraîche, avec ses caractéristiques et ses risques propres. Par conséquent, la vigilance dans ce secteur est également de mise et lisez attentivement le BRA (Avalanche Risk Bulletin) pour connaître la quantité de neige et l’orientation la plus dangereuse, pour choisir le bon itinéraire.