On les met à toutes les sauces, et ils ont des noms obscurs : E450, E104, E967… Mais en moyenne chaque Français ingère environ 4 kg d’additifs par an… le plus souvent sans le savoir. De quoi révolter Sébastien Loctin. Egalement cet entrepreneur lyonnais « passionné par la bouffe », il a créé le collectif « En vrai » début 2022.

Regroupant 60 marques françaises comme Candia, D’aucy ou Yoplait, l’association, dont il est président, a pour objectif de faire du lobbying pour que les entreprises agroalimentaires affichent clairement leur origine, leur impact environnemental, un indice nutritionnel plus complet sur leurs produits. . leurs ajouts. « C’est cohérent avec les récents encouragements d’Emmanuel Macron à consommer français », explique Sébastien Loctin, ravi d’usurper un tel allié. Rien n’est interdit. Nous informons. Il serait normal que les consommateurs sachent ce qu’ils mangent. C’est la démocratie alimentaire. Et, assure-t-il, cela n’est pas toujours respecté.

Le fin gourmet, le quinquagénaire souriant, ne jure que par les produits bruts. Prenant position contre les additifs il y a 12 ans, il a fondé la société Biofuture, qui produit des huiles et herbes bio Quintessence puis Nod, aujourd’hui distribuée dans 600 points de vente.

Héritage et génétique

Il a quelque chose à quoi s’accrocher. Après avoir été agriculteur, son grand-père est pâtissier de la compagnie transatlantique Le Normandie. Mais Sébastien Loctin en est persuadé : chacun porte en soi un héritage transgénérationnel. Même si ses parents travaillaient dans le prêt-à-porter, le goût de la terre et de la vie saine qu’il partage avec ses frères est ancré dans ses gènes.

Avant de se lancer dans une carrière bien huilée chez Lesieur, débutant comme stagiaire et finissant comme directeur du développement pour l’Europe et l’Afrique, Sébastien Loctin a côtoyé des situations plus difficiles. Ne voulant pas poursuivre ses études après un BTS, son père l’envoie à Roanne travailler dans une boîte de prêt-à-porter pour femmes mûres. Il en rigole encore : « A la fin de ce boulot et après avoir séjourné dans un hôtel de F1 pendant six mois, je suis retourné étudier. »

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Service militaire musclé

Il alterne alors l’École supérieure de développement économique et social de Lyon (Esdes) avec un service militaire musclé aux Commandements de l’Air, frôlant la catastrophe lors d’un saut en parachute dans lequel sa tourelle est placée en torche. « Le service militaire a été une expérience formidable », dit-il. Tout le monde avait le crâne rasé, portait la même tenue ; nous nous sommes liés d’amitié avec des gens que nous n’aurions jamais rencontrés dans la vie civile. »

Après sa carrière chez Lesieur, Sébastien Loctin rejoint la tonnellerie Oeneo à Perpignan, où lui succèdent sa femme et ses deux enfants. Premier choc : « En passant d’un groupe connu à une entreprise qui l’était moins, je me suis rendu compte à quel point notre identité peut être imprégnée d’une marque, ça respire. J’avais l’impression d’avoir perdu une partie de moi-même. Il a ensuite travaillé pour le groupe de négoce Advens, avant de se lasser de jouer un double rôle et de créer sa propre entreprise. « J’ai fermé les yeux sur le marketing d’aliments dont je n’aimais pas la composition. Le soir je devenais un homme différent avec mes enfants que je nourrissais selon mes critères. »

Il laisse tout derrière lui, subit un premier échec en montant une éco-huilerie trop ambitieuse. « Il a mis ses économies et ses efforts dans ses projets. C’est courageux. Il ira jusqu’au bout de ses convictions, confie Nicolas Facon, directeur de D’aucy France, qui le connaît depuis 25 ans. Son sens de l’humour et son extraversion peuvent le rendre superficiel. Ce n’est pas. Il a fixé un cadre très exigeant pour son entreprise et s’y tient strictement. »

Biofuture emploie 19 personnes et réalise un chiffre d’affaires de 4 millions d’euros. Sébastien Loctin table sur 6 millions d’ici 2023. Il reste habité par l’idée qu’on peut changer le monde grâce à l’alimentation, et que chacun peut participer à ce combat à la fourchette tirée.