La nouvelle a fait l’effet d’une bombe et dix jours plus tard, son effet ne s’est pas estompé. Depuis l’annonce le 14 novembre de la fermeture de la brasserie Espérance, propriété du néerlandais Heineken, ses 220 salariés ont fait part de leur « incompréhension » et de leur « confusion ». Après 24 heures de débrayage, ils ont repris le travail le 16 novembre. Sans grande motivation, selon les associations.

Pour justifier cette décision stratégique, la direction française du groupe a invoqué « un isolement au cœur de la ville qui empêche toute expansion, une implantation trop éloignée des nouveaux bassins de consommation du sud et de l’ouest de la France, des coûts de production trop élevés dus à certains équipements vétustes. et une stratégie de diversification industrielle improductive et de mauvaises performances environnementales ».

Le 23 novembre, Jean Rottner, président du conseil régional du Grand-Est, a appelé Pascal Gilet, président de Heineken, pour « évoquer les critères qui ont influencé sa décision ». L’élu qualifie de « surprenante » l’annonce de Heineken qui a été faite « sans concertation ». « Si cela devait se confirmer, il serait pour moi inacceptable, de rejeter les formes habituelles de dialogue entre entreprises, collectivités et salariés », a-t-il déclaré. Les autorités locales ont annoncé la création d’une « Task Force » pour tenter de garder la bière hollandaise.

« Fossoyeur du savoir-faire local »

Présente à Schiltigheim depuis 1972, la marque est apparue pendant une dizaine de jours comme « le tombeau des savoir-faire des siècles » en Alsace. « Heineken a racheté Adelshoffen et fermé le site de notre ville il y a vingt ans », se souvient Danielle Dambach, maire écologiste de cette ville de 33.000 habitants située dans la banlieue nord de Strasbourg. « Ils ont également amené Fischer à laisser 4,5 hectares de terrain en 2009. Maintenant, ils veulent tuer l’Espérance, ce qui n’était pas un déficit. Ils ne comptent pas sur moi pour les aider à transformer ces 12 hectares en projet immobilier ! Je le bloquerai jusqu’à ce que je sois maire. Ce site doit conserver sa vocation économique », prévient Danielle Dambach.

Heineken, pour l’instant, n’a pas prétendu le contraire. La brasserie promet de mener une « recherche de repreneurs » et d’identifier « des acteurs possibles avec un projet solide et pérenne ». « Mais ce site souffre de nombreuses contraintes du fait de sa localisation qui n’est plus stratégique et de ses coûts de production trop élevés », reconnaît déjà Pascal Gilet, président de Heineken France, réduisant d’emblée les espoirs de poursuite de l’activité à Schiltigheim.

Maintenir la marque locale Fischer en micro-brasserie

Heineken entend maintenir son niveau de production en France (environ 6 millions d’hectolitres) en transférant ses volumes de Schiltigheim vers les deux autres brasseries qu’il exploite à Mons-en-Barœul (Nord) et Marseille (Bouches-du-Rhône). La marque locale Fischer continuera à être produite en Alsace, avec un projet de création d’une micro-brasserie. Un projet que les syndicats FO et CGT ont déjà qualifié de « peu crédible ».

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Dans un communiqué, la direction française de la brasserie néerlandaise rappelle que son projet de réorganisation s’inscrit dans un contexte de « diminution des parts de marché d’Heineken en France » et de « concentration des outils de production à travers des méga-brasseries des principaux acteurs de la secteur ». Kronenbourg, propriété de la brasserie danoise Carlsberg, a notamment réalisé un investissement industriel de 100 millions d’euros dans son site industriel d’Obernai, à 30 kilomètres de Schiltigheim.

« Nous sommes victimes d’une fermeture d’entreprise », déplore Didier Deregnaucourt, délégué syndical CGT à la brasserie de l’Espérance. Tout en soulignant la démotivation de ses amis, il demandera une « prime d’assiduité d’une trentaine d’euros par jour » qui viendra s’ajouter au salaire pour récompenser ceux qui travaillent à Schiltigheim depuis trois ans. Les négociations du plan social devraient débuter durant la deuxième semaine de décembre et s’achever mi-février.

« Fermer Schiltigheim pour tout concentrer dans le Nord et à Marseille, c’est un non-sens écologique », juge Vania Brouillard, déléguée centrale des FO chez Heineken France. « La stratégie des trois sites était la bonne car elle séparait le prélèvement d’eau de la nappe phréatique. L’eau est une ressource essentielle dans la brasserie et quand cela n’arrivera plus, Heineken regrettera sa décision », prévient le syndicaliste.

Des friches brassicoles à requalifier

A Schiltigheim, l’ancienne malterie Fischer a été conservée comme un symbole dans le nouveau quartier résidentiel qui a surgi à la place de la brasserie fermée il y a treize ans. Abandonnée après sa faillite en 2006, la brasserie familiale Schutzenberger a laissé derrière elle une autre friche sur trois hectares à l’entrée de la ville. La municipalité n’a pas encore trouvé de solution définitive pour sa requalification. L’ancienne usine Adelshoffen est devenue un quartier résidentiel, où la mémoire des lieux est cultivée par une micro-brasserie artisanale.

« L’immobilier en centre-ville est un potentiel d’accueil pour Heineken. Je m’y opposerai en tant que vice-présidente de l’Eurométropole de Strasbourg chargée du plan local d’urbanisme, insiste Danielle Dambach. Au risque qu’Espérance fasse un nouveau gâchis de terrain sur le territoire de sa commune ? « Je suis écologiste et je défends l’emploi. Ceux qui ont porté notre héritage devront en payer les conséquences sur le long terme », répond Danielle Dambach. La fermeture de Heineken ne signifie pas la fin de la bière alsacienne. Sur les dix millions d’hectolitres produits annuellement dans la région, six millions sont déjà produits sur le site de K2, à Kronenbourg à Obernai.

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