1. Quel vin choisir pour une sauce ?

Bon vin, bonne sauce, comme on dit. Et sa conséquence : mauvais vin, mauvaise sauce. Certains pensent qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un bon vin pour cuisiner. Grosse erreur! Tout vin donne à une recette non seulement son alcool (rapidement éliminé par la chaleur), mais aussi ses arômes, son acidité et ses tanins. On retrouve à l’arrivée la qualité de ce qu’on a mis au départ. Une piquette cuite reste une piquette, et un bon vin fera chanter un plat. Christophe Philippe, chef parisien (adresses en fin d’article), a simplifié le processus : « J’ai deux récipients (un pour le blanc, un pour le rouge) où l’on récupère le fond des bouteilles, et c’est bien.  » Il faut dire qu’on ne sert que des bons vins chez Christophe, qui déclare pourtant préférer les très bons vinaigres de vin en cuisine. Le chef Maxime Laurenson, à Lyon, loue la sagesse des anciens : « Ils disaient qu’il fallait utiliser le vin qu’on voulait boire avec le plat pour la sauce. Je pense que c’est très raisonnable et j’ai appliqué ce principe à mon lièvre à la royale ».  » Pour cette vénérable recette, vous pouvez recommander un vin rouge corsé du Médoc ou des Côtes-du-Rhône.

2. Vin blanc ou vin rouge ?

Si seulement il y avait du blanc et du rouge ! La question devrait inclure le vin orange, le vin rosé et le vin mousseux. Les règles classiques – le blanc pour les poissons et les viandes blanches, le rouge pour les viandes rouges – connaissent une foule d’exceptions : le rosé dans la cuisine des poissons d’eau douce, le vin blanc sec dans le mode du bœuf. Le rosé se révélera dans une sauce plus proche d’un rouge que d’un blanc, tandis que le vin orange, qui est un vin blanc vinifié comme un rouge, liera la finesse du premier au tanin du second et se situe à mi-chemin entre le chemin entre l’un et l’autre. La note oxydative qu’il donne incite souvent à cuisiner avec. Quant aux vins effervescents comme le champagne, si leurs bulles disparaissent à la cuisson, ils vont alléger la texture d’une sauce émulsionnée à feu doux : un sabayon au champagne, par exemple.

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3. Corps, sucre, acidité

Outre sa couleur, trois critères doivent guider votre choix de vin : sa teneur en tanin (qui va structurer la sauce), son taux de sucre (qui détermine sa douceur et son onctuosité) et son acidité (principale raison d’être du vin en cuisine ). Les vins doux, sucrés ou fortifiés sont d’excellents ajouts de dernière minute. Rien de tel qu’un porto rubis ou fauve pour déglacer la cuisson d’un pigeon rôti en marmite : le sucre lie les jus et l’acidité relève les jus naturels de la volaille. Quant aux liquoreux, les cuissons longues ont tendance à gommer leurs arômes, mais les cuissons courtes préservent leur délicatesse dans les sauces et les desserts : « Je réduis le sauternes avec un peu de basilic, précise le chef parisien Claude Colliot, pour relever des fraises ou des pêches blanches ». Florent Pietravalle, du restaurant La Mirande à Avignon, ajoute un peu de vin doux « cru, pour ne pas perdre la complexité du goût » dans la sauce d’un turbot. Les blancs secs, dit-il,  » conviennent aux crustacés, car ils donnent une acidité intéressante. Quand on l’utilise pour ouvrir des poissons et crustacés, on peut récupérer ce vin pour en faire une base de cuisson.  » Imaginez cette base dans un risotto aux fruits de mer de un vermentino d’Italie ou un roulé du sud de la France (c’est le même cépage)… Pour une nage d’écrevisses, choisissez un sauvignon de la Loire et on ne présente plus l’affinité entre le muscadet de la région nantaise et les palourdes ou fruits de mer. Le choix d’un vin rouge dépendra de la texture que vous souhaitez donner à une sauce : si vous la voulez épaisse ou crémeuse, par exemple avec une daube de bœuf provençale, il vous faut un vin corsé riche en comme les rouges du sud à base de syrah, de mourvèdre ou de carignan. Les sauces plus délicates – meurette, matelote, coq au vin – demanderont un rouge plus léger et plus fluide comme un pinot noir de Bou rgogne ou un Gamay d’Auvergne.

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4. Quels sont les meilleurs vins pour cuisiner ?

Tout le monde n’aime pas boire des vins oxydatifs, mais tout le monde, y compris les chefs, s’accorde à dire qu’ils sont supérieurs pour la cuisine. Jerez, vin jaune du Jura, vin de voile de Gaillac, vin de riz de Shaoxing (pour la cuisine chinoise, mais pas que), donnent aux plats une touche fumée et élégante qui les rend irrésistibles. Christophe Philippe, Maxime Laurenson et Claude Colliot ne taisent pas d’éloges sur leurs vertus culinaires. « J’utilise, précise Claude Colliot, des vins jaunes ou des vins de paille du Jura et des Gaillacs oxydatifs pour le homard, les pâtes aux truffes, les cèpes ou tout autre champignon ». Mais il n’y a pas vraiment de « meilleur vin » pour cuisiner. Tout dépend des ingrédients, de la recette et du type de cuisson. Le cépage est souvent le fil conducteur : « Parmi les vins blancs secs, précise Claude Colliot, j’utilise le sauvignon pour les cuissons longues de veau ou de volaille. Pour le poisson, je préfère le Muscat à petit grain, sec et minéral, de la vallée du Rhône, moins agressif et plus délicat que le Chardonnay ».

5. A quel moment utiliser le vin dans un plat ?

Le vin en cuisine est aussi une question de timing. L’étape à laquelle il est utilisé fait toute la différence : en marinade, en début ou en cours de cuisson, ou en touche finale. A travers la marinade, le vin s’imprègne des ingrédients et transfère ses arômes en profondeur. Mais comme il durcit la viande, il vaut mieux éviter une longue marinade pour les viandes rouges, voire simplement rajouter du vin en début de cuisson. Quand c’est long, ça ne change pas beaucoup le goût. Une marinade longue sera plus appropriée pour un gros gibier, sanglier ou cerf. Il y a aussi beaucoup à dire sur le vin ajouté au dernier moment car l’alcool non éliminé par la chaleur s’invite dans la saveur obtenue. « En fin de cuisson, dit Claude Colliot, un vin oxydatif donne un fruité très doux, une longueur en bouche » Florent Pietravalle aime appliquer cette méthode au vin rouge : « Je choisis des vins fruités des Côtes-du-Rhône, Je fais macérer des raisins frais pour faire ressortir la fraîcheur, puis je les réduis et les lie au sang pour les ajouter tout à la fin. La finesse du vin prendra beaucoup plus de temps à la sauce ». Cela devrait vous sembler clair maintenant : le vin en cuisine connaît peu de tabous, mais se prête à toutes les expériences.

Merci aux chefs qui ont répondu à nos questions :

Claude Colliot : Restaurant Claude Colliot, 40, rue des Blancs-Manteaux, 75004 Paris. Tel. : +33 01 42 71 55 45.