« Je voulais faire revivre la terre et les hommes. Mais comment ? Comment amorcer la transition vers la psychologie agricole en aidant les plus vulnérables ? A ces questions personnelles, Maxime Pawlak a trouvé la réponse : créer Éloi, une entreprise ayant pour objectif de facilitant la transmission de l’agriculture et l’installation d’agriculteurs agricoles. Il a reçu le Prix Philibert-Vrau de l’Economie du Bien Commun 2022, décerné le jeudi 1er décembre par la Fondation des Entrepreneurs et Dirigeants Chrétiens (EDC).

La lecture de l’encyclique Laudato si’ du pape François et une conférence de Jean-Marc Jancovici, ingénieur et fondateur de la société de conseil Carbone 4, ont accéléré la prise de conscience environnementale de cet ancien entrepreneur informatique : « Tout cela m’a fait réfléchir. Je voulais y retourner pour une autre aventure, un acte qui sert la récupération au-delà de la conservation. »

Des fermes trop grandes, inadaptées et chères

A l’origine d’Éloi, co-fondé par François Moret, il y a un constat : « Il y a 400 000 fermes en France. Dans dix ans, la moitié sera dépassée car beaucoup d’agriculteurs ont la cinquantaine et la soixantaine et seront bientôt à la retraite. Chaque année, 20 000 fermes sont vendues, dont la moitié sont confisquées. Donc on perd 10 000 agriculteurs par an, disait Maxime Pawlak, Quand on a travaillé la terre toute sa vie, c’est une vraie galère de ne pas trouver de repreneur. »

Pourtant, de nombreux jeunes souhaitent se lancer dans l’agriculture, mais les exploitations sont souvent trop grandes, inadaptées et chères pour eux, selon le leader d’Éloi, et « 60% des candidats aux aménagements agricoles ne sont pas issus de l’agriculture ».

C’est là qu’Eloi entre en jeu. L’entreprise propose plusieurs solutions. Un cédant peut vendre un immeuble qui n’a pas d’utilité aux acquéreurs, pour effectuer des opérations de transformation sur ses biens. Il peut aussi vendre une partie de son exploitation à de jeunes agriculteurs ou leur permettre de reprendre une exploitation à quelques promoteurs pour des projets complets.

C’est ce que Maxime Pawlak appelle le « cluster agricole ». Cela réduit leur investissement initial. Et d’accélérer la transition vers l’agriculture selon lui car « les jeunes s’intéressent souvent à l’agriculture, ils sont en recherche de sens ».

En Pays de la Loire, Éloi l’a fait avec trois fermes aux 3 activités différentes, l’élevage, l’agriculture et le maraîchage. « Enfin, on crée beaucoup de choses, comme un immeuble avec des appartements. Ce sont des voisins proches mais pas apparentés, précise Maxime Pawlak. Bref, ils coopèrent en combinant souvent la distribution en circuit court, les commerces de ferme, etc. Le système favorise aussi l’agriculture. le fumier peut être utilisé par les agriculteurs, la rotation des cultures est possible…

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Une dizaine de projets depuis 2019

Dès lors, un cercle vertueux s’est créé avec de nombreux bénéfices : « Cela permet de réorganiser la société et de prendre soin des faibles. Parce que l’agriculture est un secteur souffrant, avec le taux de suicide le plus élevé par rapport à C’est aussi la première victime de problèmes environnementaux tels que les tempêtes de grêle, les sécheresses et les inondations.

Avec désormais 10 salariés et 6 freelances, Éloi a permis de mettre en place près d’une dizaine de projets depuis sa création en 2019. Elle gère actuellement 60 projets de transition ou de transfert de travail, selon le fondateur. « Mais l’inertie est forte en agriculture, reconnaît Maxime Pawlak. A partir du moment du contact avec le transfert, il faut dix-huit mois pour mener à bien le projet de transfert. »

Alors que l’entreprise se concentre actuellement sur la Bretagne, la Normandie, les Pays de la Loire, l’Auvergne-Rhône-Alpes et le nord de la Nouvelle-Aquitaine, Éloi souhaite couvrir à terme toute la France. L’objectif de Maxime Pawlak est de mettre en place 1 500 projets agricoles ou de transmission différents par an.

D’autre part, le jeune entrepreneur a lancé plusieurs projets au service de la terre et des gens. A l’occasion des élections régionales en Bretagne en 2021, il organise les « Laudato si’ interviews », une série d’entretiens dans lesquels les candidats sont interrogés sur des problématiques environnementales et sociales. En 2022, ce membre d’EDC a été nommé président du conseil local.

Son inspiration, sa fille Faustine

« Il y a une dizaine d’années, j’ai vécu une transformation spirituelle. Quand j’étais jeune, je pensais que j’étais catholique, puis en grandissant, je me définissais comme athée, jusqu’à ce que je rencontre ma femme. Mon désir d’aider les plus vulnérables, je le dois à ma fille Faustine. À l’âge de 7 mois, le dernier des trois enfants a fait une crise. Six mois plus tard, un diagnostic tombe : elle est atteinte du syndrome Dup15q, une maladie génétique rare. Nous avons compris alors que Faustine ne se contrôlerait jamais, qu’elle ne parlerait jamais.

Le soir même, j’ai commencé à rédiger le plan d’affaires d’Éloi. Le handicap est le moteur de la véritable compassion dans le monde. Ma fille m’a frappé. Faustine, Dieu m’a tout donné : l’idée, les investisseurs et le partenaire. La garderie aménagée pour ma fille a été suivie d’un espace de co-working où j’ai rencontré mon premier investisseur et co-fondateur d’Éloi, François Moret. »