Blaise Matuidi, N’Golo Kanté, Benjamin Kayser… c’est un transfert surprenant que la licorne française Alan a négocié. La start-up spécialisée dans l’assurance santé a le plaisir d’annoncer, en début de semaine, un partenariat avec des sportifs de renom qui proposeront des master classes et des conseils de professionnels dans l’application. Une stratégie qui rappelle celle des Gafa.

Les géants technologiques américains ont compris, en effet, ces dernières années, que la santé pouvait leur offrir un nouveau débouché très rémunérateur s’ils parvenaient à se différencier avec des outils de jeu très axés sur la prévention. C’est pourquoi Google ou Apple investissent autant dans leurs montres connectées et proposent, dans leurs applications santé, des conseils et entraînements sportifs personnalisés. Et c’est cette même stratégie qui a permis à Alan de s’imposer sur le marché très fermé de l’assurance santé.

La start-up a ainsi conçu son application avec un soin extrême pour que même les phobiques administratifs prennent plaisir à l’utiliser. Carte de paiement dématérialisée tierce, échange en ligne, historique de remboursement… plus besoin de chercher les cartes, tout est centralisé dans l’application et facile à trouver. Et l’expérience est amusante, avec des options comme essayer des lunettes de réalité augmentée.

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L’élément central de la stratégie d’Alan est cependant d’élargir l’offre pour que les utilisateurs aient un intérêt – et une envie – à consulter l’application au quotidien : c’est la condition sine qua non pour faire de la prévention avec eux. Alors Alan se charge d’avertir les usagers lorsqu’il est temps de reprendre les rendez-vous chez le dentiste, l’ophtalmologiste, de faire leurs rappels de vaccination ou le suivi médical des enfants.

Clinique virtuelle et santé mentale

La startup a également construit une clinique virtuelle dans l’application, dans laquelle les clients peuvent poser des questions sept jours sur sept à des professionnels de santé de 10 spécialités différentes (médecin généraliste, dermatologue, pédiatre, diététicien, etc.). Le génie d’Alan pourrait encore être le rachat de la société américaine Jour, il y a un an, pour 20 millions de dollars. C’est en effet ce qui lui a permis de s’investir dans le domaine de la santé mentale en lançant Alan Mind, un service qui propose un accompagnement et des exercices personnalisés dans ce domaine.

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« La santé mentale est un domaine très important, dans lequel il est parfois difficile de faire le premier pas, nous avons voulu démystifier tout cela et rendre ces outils plus accessibles », explique Jean-Charles Samuelian-Werve. Cette stratégie séduit son public cible, à savoir les entreprises à la recherche d’une couverture santé pour leurs salariés. La prévention est, il est vrai, une démarche gagnant-gagnant : les adhérents évitent les problèmes de santé et les entreprises les frais de santé qu’ils entraînent.

Résultats? Six ans après sa création, Alan a convaincu plus de 18 000 entreprises en France mais aussi en Espagne et en Belgique, sécurisant 340 000 salariés au total. La startup réalise aujourd’hui plus de 220 millions de chiffre d’affaires et emploie 530 personnes. Cependant, la licorne a encore des défis à relever. « Les géants de l’industrie ont des décennies d’histoire de primes, ils détiennent donc un avantage décisif sur ces nouveaux entrants », déclare un investisseur en capital-risque.

Les mastodontes du secteur à l’affût

Bien qu’ils soient moins agiles que les start-up, les opérateurs historiques suivent de très près les innovations qu’ils construisent et n’hésiteront pas à reproduire les options qui séduisent le plus. Dans le secteur bancaire par exemple, les établissements traditionnels ont mis longtemps à proposer des applications et des sites Internet dignes de ce nom, mais depuis qu’ils ont pris le virage, leurs produits numériques n’ont plus rien à envier à ceux de nombreuses néobanques. Résultat : après des débuts prometteurs, beaucoup d’entre eux ont toutes les peines du monde à transformer le texte.

Chez Alan, cependant, l’optimisme règne. « Nous sommes convaincus de notre capacité à garder une longueur d’avance sur la concurrence », assure avec confiance Jean-Charles Samuelian-Werve. Même la baisse des investissements technologiques en 2022 n’inquiète pas l’équipe : « Nous avions anticipé ce contexte sombre et nous étions organisés pour que la levée de fonds de mai dernier soit la dernière nécessaire pour atteindre la rentabilité que nous projetons en 2025. » Avec les 183 millions d’euros obtenus au printemps, Alan la licorne a désormais de quoi galoper longtemps.

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