Vaut-il mieux changer les fenêtres ou isoler son grenier ? Pouvez-vous vraiment isoler votre maison pour un dollar? Nous avons répondu aux questions les plus courantes.

L’augmentation des prix de l’énergie pose la question de la performance énergétique des bâtiments et la nécessité d’engager des plans généraux d’amélioration de l’habitat. Une proposition de loi a été proposée par le groupe La France insoumise (LFI) dans le cadre de sa niche parlementaire jeudi 24 novembre, pour accélérer la rénovation thermique des logements en garantissant un « repos gratuit » aux ménages les plus modestes qui effectuent des travaux et interdisent la location des logements les plus énergivores.

Mais vaut-il mieux changer les fenêtres ou isoler son grenier ? Les maisons plus anciennes ou très grandes sont-elles les pires filtres thermiques ? Pouvez-vous vraiment isoler votre maison pour un dollar? Nous avons passé en revue neuf idées reçues sur le sujet.

« Ces vastes plans de rénovation arrangent surtout le secteur du BTP »

Certes, les Plans de Rénovation Energétique donnent du travail pendant plusieurs années aux acteurs du bâtiment et des travaux publics (BTP), mais ce secteur est confronté à des problèmes de pénurie de main-d’œuvre qui l’empêchent d’utiliser pleinement ces aides. Lors de l’examen du budget 2023 à l’Assemblée nationale, la majorité s’est appuyée sur cet argument pour refuser d’ajouter 12 milliards d’euros pour l’amélioration du logement. « L’enjeu de la rénovation est loin de se limiter à une simple dimension budgétaire. Il faut d’abord (…) développer le secteur et le planifier. (…) Sans ce travail initial, toute augmentation du budget équivaudrait à ouvrir des crédits qui ne seront pas utilisés », a fait valoir Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement.

Selon la Fédération française du BTP, le secteur n’a jamais cessé de créer des emplois (86 600 postes de plus depuis le premier confinement, au printemps 2020), ce qui explique en partie, faute de jeunes actifs qualifiés, les difficultés de recrutement encore très génial. En 2021, une campagne a été lancée pour recruter 150 000 professionnels d’ici 2023.

En raison de la perturbation des chaînes d’approvisionnement causée par la crise du Covid-19 et de la consommation des stocks par les industriels, le BTP fait face à des difficultés persistantes d’approvisionnement en matières premières (les approvisionnements en ciment, béton, granulats, tuiles et briques ont diminué cette année) , entraînant des pénuries de certains matériaux de construction, tels que l’acier ou l’aluminium, ainsi que des prix de l’énergie exorbitants.

« Les pires passoires thermiques, ce sont les grands logements »

Près de 20 % des 36,6 millions de logements français sont très énergivores, selon l’Observatoire national de la rénovation énergétique (ONRE). Parmi ces cibles thermiques, classées F ou G par le diagnostic de performance énergétique (DPE), on compte 5,2 millions de résidences principales.

La proportion de « filtres thermiques » est plus élevée pour les petites habitations. Un tiers des appartements ou maisons de moins de 30 mètres carrés sont mal classés, contre seulement un huitième pour les plus grandes surfaces.

L’ONRE propose deux explications à ce résultat contre-intuitif :

« Le problème, ce sont les vieilles baraques à la campagne »

Un peu plus de 22 % des logements situés en zone rurale, soit 936 000 logements, sont des passoires thermiques, selon les estimations du ministère de la Transition écologique. Une part légèrement supérieure à la moyenne nationale (19,6 %), mais inférieure à celle de la métropole parisienne, où elle atteint 23,6 % des foyers, soit 1,3 million. Une situation qui se traduit notamment par la forte proportion (41 %) de copropriétés qui sont en classe E à G (la moins performante), selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).

Le mode de chauffage est en effet plus pertinent que la distinction urbain-rural pour appréhender les différences de performances énergétiques : 44,4 % des résidences principales chauffées au fioul domestique (ou autres dérivés pétroliers) sont thermiques si (F à G) . C’est trois fois plus que les foyers qui dépendent d’autres sources d’énergie : 15,4 % pour les radiateurs électriques, 12,1 % pour le gaz et 13,2 % pour le bois).

« Un bâtiment ancien est forcément moins bien isolé qu’une construction moderne »

Contrairement à certaines idées reçues, les bâtiments anciens datant d’avant 1948 ont souvent « des propriétés thermiques plus intéressantes que les bâtiments des années 1960 ou 1970 », note l’Ademe. Ces habitats, qui représentent un tiers des logements, bénéficient souvent « d’une grande inertie thermique, qui garantit un bon confort en été et un comportement thermique satisfaisant en hiver ».

Une étude des bâtiments anciens réalisée par les pouvoirs publics alsaciens en 2015 a même trouvé, pour les logements d’avant 1948, des étiquettes énergétiques « proches de la moyenne nationale des logements ».

Comme le rappelait en 2007 un rapport mené par la direction générale de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction, les bâtiments anciens sont souvent bien adaptés à leur environnement (ensoleillement, direction du vent, humidité), sans ponts thermiques entre façades et étages, construits avec des espaces tampons ( sous-sol, buanderie, grenier…) limitant les échanges thermiques avec l’extérieur et dans les matériaux à forte inertie. L’Ademe exhorte également « à ne pas dégrader ces qualités des bâtiments anciens » lors des opérations de rénovation, notant que les propriétés respirantes des murs sont particulièrement importantes.

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« Pour une bonne rénovation, mieux vaut y aller par étapes »

Bien que ce type d’opération ne soit pas accessible à toutes les bourses, mieux vaut faire tous les travaux d’un coup pour viser une réelle amélioration énergétique. « Il est fortement conseillé d’isoler l’ensemble de sa maison en une ou deux étapes de travail maximum, insiste l’Ademe. Plus les étapes sont multipliées, moins on a de chances d’atteindre la performance visée. Par exemple, si l’isolation de la toiture n’est pas réalisées en même temps que les murs, des ponts thermiques peuvent se produire s’ils n’étaient pas prévus. Cependant, sous certaines conditions, dont « une bonne conception en amont », une unité à trois étages permet également d’atteindre des normes de faible consommation, selon une étude récente de l’Ademe portant sur les maisons individuelles.

De plus, « au lieu d’enchaîner les chantiers les uns après les autres, rénover globalement son logement réduit le coût total des travaux et vous rend éligible à une aide gouvernementale supplémentaire », comme le rappelle le site gouvernemental France Rénov’. Parmi eux le forfait « rénovation globale » de MaPrimeRénov’, ou l’accompagnement réservé aux ménages modestes MaPrimeRénov’Sérénité, qui vise à économiser plus de 35% d’énergie.

Cependant, ces rénovations globales restent largement minoritaires : seuls 57 117 logements ont bénéficié d’une rénovation globale sur les 750 000 projets de rénovation financés en 2021 par l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), soit. près de 8 %.

Le nombre de rénovations jugées performantes selon la réglementation (c’est-à-dire permettant « d’atteindre la classe A ou B selon le diagnostic énergétique ») est encore beaucoup plus faible.

« Pour un euro, on peut isoler ses combles ou avoir une chaudière neuve »

Attention à la fraude : A partir du 1er juillet 2021, le coup de pouce « isolation des plafonds et des sols » a été modifié pour mettre fin aux offres à un euro qui pourraient cacher des pratiques commerciales trompeuses. Les travaux téléphoniques concernant la rénovation énergétique sont également interdits depuis septembre 2020. En revanche, le « 1 euro boost » est maintenu pour les travaux réalisés avant le 30 juin 2022 avec des barèmes moins avantageux.

Pour obtenir un travail à moindre coût, il est nécessaire de combiner plusieurs aides différentes, dont certaines dépendent du niveau de revenu. Avant d’accepter une offre de rénovation, vous devez déposer une demande de subvention et attendre de savoir si vous êtes admissible et à quel montant ces travaux vous donnent droit.

Le projet de loi visant à accélérer la rénovation thermique des logements, présenté par le groupe LFI, qui sera examiné le 24 novembre à l’Assemblée nationale, prévoit de « cibler les aides à la rénovation en fonction des revenus des ménages, avec un maintien à zéro impôt pour les plus modeste ». Mais il est peu probable qu’il soit voté en l’état, en raison de l’opposition de la majorité.

« La priorité, c’est d’améliorer son système de chauffage »

Avant d’essayer de changer de mode de chauffage, mieux vaut miser sur l’isolation. « Un logement bien isolé retient mieux la chaleur et consomme donc moins d’énergie », explique Florence Clément, coordinatrice information grand public et jeunes à l’Ademe, auprès de 60 millions de consommateurs. Le confort thermique est meilleur dans les maisons bien isolées.

Changer le chauffage avant d’améliorer l’isolation de la maison peut être contre-productif, ajoute-t-elle. « Il devient surdimensionné. Un fonctionnement en sous-vitesse accélère cependant l’usure du matériel, dégrade son rendement, augmente sa consommation énergétique et ses émissions polluantes. »

Pour éviter de remplacer tous les radiateurs, il est possible de ne remplacer que votre chaudière, surtout si elle est ancienne. Dans tous les cas, mieux vaut être bien informé avant de procéder à un changement de système de chauffage.

« Le plus efficace, c’est de changer les fenêtres »

Si une sensation de froid se fait souvent sentir à l’approche des fenêtres en hiver, ce n’est pas forcément la première source de déperdition de chaleur. L’Ademe donne l’exemple d’une maison construite avant 1974 et non isolée : les fenêtres ne représentent que 10 à 15 % des déperditions thermiques, soit beaucoup moins que le toit (jusqu’à 30%) et les murs (de 20% à 25%).

Bien sûr, comme le notait un rapport du ministère de la Ville sur les bâtiments anciens de 2011, ce constat varie selon les caractéristiques de chaque logement : simple ou double vitrage, copropriété… Il est donc important d’identifier les sources de chaleur perte. d’un cas à l’autre.

Pour les ouvertures, comme les fenêtres ou les portes, il ne faut pas « confondre les déperditions de chaleur par les défauts d’étanchéité, qui peuvent être corrigés (fuites d’air), et les déperditions de chaleur par les matériaux eux-mêmes (le verre, le bois) », notait l’étude de l’ancien constructions réalisées en Alsace en 2015.

« Pour isoler, la paille ou la laine, c’est naturel et plus sain »

La laine de bois et la ouate de cellulose, deux des matériaux biosourcés les plus utilisés, sont aussi « efficaces et sains que les matériaux conventionnels dans des conditions d’utilisation appropriées », concluait une étude publiée en 2022 par l’Ademe, qui invitait à poursuivre les recherches sur les matériaux « sous réserve ». développement, comme par exemple le béton de chanvre ou la paille ».

Les matériaux biosourcés, fabriqués à partir de matières premières d’origine animale ou végétale (bois, paille, cellulose, liège, etc.) sont souvent recommandés car ils ont une empreinte carbone limitée. Pour autant, l’aspect écologique n’est pas forcément gage de qualité hygiénique : ils peuvent contenir « des additifs nécessaires à [sa] conservation » voire des pesticides, prévient l’Ademe, qui déplore qu’il n’y ait « pas de repères qui permettent d’affirmer, qu’un produit est sain ou pas ». En France, cependant, il existe des étiquettes indiquant les émissions de polluants volatils qui peuvent être irritants ou cancérigènes.

Dans tous les cas, il faut rappeler qu’un matériau mal choisi ou mal installé, par le développement de moisissures, peut « favoriser les maladies respiratoires chez les habitants du logement », comme le rappelle l’Ademe.

Mise à jour du 24 novembre à 11h00 : ajout d’une enquête et de détails sur la rénovation thermique progressive.

Léa Sanchez, Mathilde Damgé et Romain Imbach