Ne fermons pas les yeux sur la gravité de la situation. Cependant, les circonstances apportent des opportunités commerciales indéniables.
On se voile encore un peu la face sur les conséquences pour le secteur immobilier résidentiel de la tourmente économique actuelle. A l’heure où nous écrivons ces lignes, plusieurs grandes marques du secteur viennent de présenter leurs synthèses pour le premier semestre 2022 et font des pronostics pour le suivant.
La prudence, qui est une vertu, a inspiré leurs discours, comme toujours, mais la clarté n’a pas manqué sur la gravité des circonstances. Le ralentissement des ventes ne s’est pas démenti et un atterrissage était attendu. Oh, nous avons rencontré ici et là des phrases retirées de la réalité, marquées par un art consommé de l’euphémisme, du type « On ne peut pas exclure que l’inflation, si elle est durable, affecte les volumes de vente, sinon les prix. », mais la conscience collective est là. Le vent soufflera fort, sans aucun doute.
Un impact sur les prix inévitable
La baisse du nombre de transactions se manifeste déjà depuis plusieurs mois, sous plusieurs effets conjugués. C’est surtout le moral des familles qui est affecté par l’ambiance géopolitique. Il y a chez tout le monde, même chez les plus petits, une peur confuse, non reconnue, mais très actuelle, qui conduit au report des projets de logements. Ensuite, il y a la désolvabilité causée par l’inflation de l’énergie et de la nourriture. Enfin, l’accès au crédit immobilier a été fermé, en raison de la hausse des taux d’intérêt – qui sont montés à plus de 2%, qui vont doubler en près de six mois -, elle-même liée à l’inflation, avec un taux d’usure excluant les ménages ayant baisse des revenus de crédit, auxquels les banques devraient appliquer des taux encore plus élevés que la limite autorisée, compte tenu de l’augmentation du coût de la ressource.
Ces évolutions viennent s’ajouter aux critères restrictifs du Haut Conseil de Stabilité Financière, empêchant des ratios d’effort supérieurs à 35% et des durées d’endettement supérieures à 25 ans. Aujourd’hui, le taux de refus de prêt hypothécaire est estimé à 40 %.
Bref, les nuages s’accumulent dans le ciel de l’opération, qui enregistre un sérieux revers. Partout il faudra que les prix remontent pour relancer les Français qui ont perdu du crédit. Le secteur immobilier n’échappe pas à cette logique économique de base, et cette fois ni le goût de la pierre ni les tensions favorables à l’offre et les vendeurs ne le feront. Il ne faut en aucun cas imaginer un effondrement, mais l’importance de la baisse est à mesurer en mesurant la perte de pouvoir d’achat des individus et des familles. De toute évidence, si les augmentations cumulées des biens de consommation de base et des taux d’intérêt affectent la capacité de payer les candidats à l’acquisition de 10 %, les prix pourraient chuter à ce niveau d’ici douze mois. On ne peut pas non plus s’en plaindre, car ils sont en hausse depuis près de vingt ans, éphémèrement corrigés par la crise des subprimes en 2008, au point que la population et la communauté immobilière s’y sont habituées.
« Il existe des perspectives d’augmentation de la part des transactions confiées à un mandataire : 75 % pourrait constituer un objectif atteignable. »
Du coup, il est tentant de faire de sombres augures pour les agents immobiliers et les négociateurs, oubliant deux espoirs. Le premier concerne la marge de croissance du taux de pénétration des intermédiaires. Aujourd’hui 2/3 du marché est crédité, pourtant ce chiffre est peut-être trop optimiste… Cependant, il existe des perspectives d’augmentation de la part des opérations confiées à un mandataire. 75% peut être un objectif réalisable et le devient lorsque trouver un acheteur devient difficile.
Le pouvoir a changé de camp et les vendeurs, autrefois maîtres du jeu, l’ont perdu en quelques mois. Quiconque pensait pouvoir se passer d’intermédiaire devra changer d’avis… notamment pour bénéficier de conseils lucides pour déterminer la valeur marchande, et exploiter tous les viviers d’acheteurs potentiels.
On arrive vite au deuxième avantage des professionnels : des prix plus bas. Ils seront les premiers agents de la modération, car ils observeront objectivement la réduction du pouvoir d’achat logement des familles pour les raisons évoquées plus haut. Les vendeurs particuliers, qui frappent leur bien avec une charge émotionnelle qui les aveugle, moins clairs sur les circonstances, mettront un bon six mois à se rendre compte qu’ils doivent calmer leurs revendications pour rendre le prix de l’oxygène aux familles. En clair, les acquéreurs préféreront les biens des portefeuilles professionnels aux offres des particuliers, déjà irréalistes et en décalage avec la moindre capacité de paiement des acquéreurs potentiels, du moins dans des marchés tendus et plus attractifs.
« Un autre atout des professionnels consiste dans leurs relations privilégiées avec les courtiers. »
Un rôle à tenir pour sécuriser les transactions
Un autre avantage des professionnels peut être leurs relations privilégiées avec les courtiers. Plus que jamais, ils pourront faciliter l’accès au crédit et optimiser les conditions de prêt, notamment le coût de l’assurance emprunteur. L’intermédiaire pourra sécuriser une opération d’achat, dans laquelle le vendeur particulier constatera souvent, après la signature de l’avant-contrat, l’incapacité financière de l’acheteur.
On ne peut pas parler de fermer les yeux sur la gravité de la situation économique. Il mettra à l’épreuve la communauté professionnelle de la transaction, femmes et hommes de la négociation, agents commerciaux en réseaux tels que les agents immobiliers, notaires, diagnostiqueurs, financiers.
Il n’en reste pas moins que les circonstances apportent des opportunités d’affaires indéniables. Après tout, le principe, oublié au temps des vaches grasses, est simple : la complexité réévalue le savoir-faire professionnel. Elle est associée à une évidence : l’exigence que les professionnels répondent au besoin d’expertise et d’engagement au service du client. Ils auront besoin d’éclaireurs pour protéger leurs transactions en ces temps incertains. En bons termes…