Publié le 3 février 2022 à 16 h 18 Mis à jour le 3 février 2022. 2022 à 18 h 59

C’est la fin d’une longue série législative et une surprise pour de nombreux observateurs. En effet, sera voté le projet de loi qui donne la possibilité aux propriétaires de changer d’assurance emprunteur à tout moment, et pas seulement à la date anniversaire du contrat.

Un compromis a été trouvé jeudi en commission paritaire. Il se réserve le droit de le modifier à tout moment, indique un communiqué du Sénat. Cet accord entre les deux chambres n’était pas certain car fin janvier, la chambre haute avait rejeté le principe du congé « infra-annuel ».

Pouvoir d’achat

Sachant le temps compté pour adopter des réformes avant les élections présidentielles, les sénateurs ont fini par accepter d’aller dans le sens de l’Assemblée et du gouvernement sur la résiliation. Ces derniers voient dans cette mesure un moyen de soutenir le pouvoir d’achat des Français, à l’heure où l’inflation remet la question au centre de la campagne.

Contractée par des personnes qui empruntent pour acheter un logement, l’assurance emprunteur doit garantir une couverture totale ou partielle de leur crédit en cas d’accident ou de maladie entraînant décès, perte d’autonomie voire invalidité.

Ces couvertures représentent une part importante du paiement mensuel d’un prêt et le gouvernement avait fait valoir qu’un primo-accédant pouvait économiser plus de 3 800 € de frais sur la durée de son prêt en faisant jouer la concurrence.

Obligations d’information

Cette concurrence devrait être encore renforcée en vertu de l’engagement trouvé, les assureurs seront tenus d’informer annuellement les clients de la possibilité de résilier leur assurance et de ses modalités d’exécution, précise le Sénat.

La députée de la majorité Patricia Lemoine (conjointe d’Agir), à l’origine du projet de loi, s’est félicitée de l’issue des négociations sur Twitter, célébrant les « grandes avancées pour les Français ».

Les associations de consommateurs avaient milité pour pouvoir résilier à tout moment. Ainsi que les assureurs et courtiers d’assurances, qui veulent pousser leurs pions sur ce marché de 10 milliards d’euros largement dominé par les banques. Ceux-ci ont l’avantage de pouvoir proposer une assurance en même temps que le crédit.

« Cette journée doit être marquée d’une pierre blanche », s’est félicitée l’APCADE, une organisation de courtiers et d’assureurs, qui milite pour la mesure depuis des mois.

D’autres acteurs reçoivent cet enthousiasme. Car la Commission paritaire a également approuvé un autre changement important : la suppression du dépistage médical (sous forme de questionnaire ou d’examen) pour les crédits immobiliers jusqu’à l’âge de soixante ans des assurés et de moins de 200.000 euros par personne. « Si vous êtes en couple, c’est 400.000 euros », précise le sénateur Daniel Gremillet.

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Suppression du questionnaire médical

Les examens médicaux et les questionnaires servent de base aux banquiers et aux assureurs pour déterminer l’état de santé d’un client et donc le montant d’assurance emprunteur qu’il est tenu de souscrire pour obtenir son prêt. Plus la santé d’une personne est fragile, plus elle devra payer pour sa couverture.

Le débat sur la sélection médicale s’est enflammé lorsque le Crédit Mutuel a annoncé en fin d’année dernière qu’il renonçait à ces démarches pour ses clients les plus fidèles – auprès de la banque depuis au moins 7 ans – et pour les crédits inférieurs à 500 000 euros.

Son retrait de la loi est loin de faire l’unanimité. « Contrairement aux apparences, cela risque d’être vraiment défavorable au pouvoir d’achat des Français, déclare Franck Le Vallois, directeur général de France Assureurs. Comment s’assurer sans connaître le risque ? Cela obligera les assureurs à adopter une approche beaucoup plus prudente, ce qui risque d’entraîner automatiquement une augmentation significative du coût de l’assurance. »

« Le marché devra travailler avec des modèles de tarification un peu différents, les critères d’âge seront peut-être plus importants à l’avenir », explique Eric Maumy, président de la société de courtage April et porte-parole de l’APCADE. Pourtant, « c’est une grande victoire pour les consommateurs », a-t-il déclaré.

Les parlementaires ont également décidé de réduire de dix à cinq ans le droit à l’oubli pour les pathologies cancéreuses et l’hépatite C. Cela permettra aux anciens patients de ne pas déclarer leurs difficultés de santé passées et donc d’avoir une assurance emprunteur au meilleur prix.

Là encore, cette mesure ne doit pas plaire aux banquiers et aux assureurs, qui cherchent à maîtriser au maximum leurs risques. « La profession bancaire parie sur l’accès à des crédits immobiliers sûrs et sur un modèle d’assurance mutualisée pour tous. Dans le nouveau cadre adopté, elle demande de maintenir ces objectifs », a commenté la Fédération bancaire française (FBF).

Le texte sera à nouveau soumis au vote à l’Assemblée le 10 février, puis au Sénat le 17 février pour être définitivement approuvé.