La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rappelé un principe fondamental pour la qualification d’un intermédiaire : seul l’intérêt économique compte, pas le mode de rémunération (1).
En effet, c’est dans la redevance que réside l’originalité du cas considéré. Une société allemande a souscrit une assurance collective contre les risques de maladie et d’accident lors de voyages à l’étranger. Elle offre à ses clients, en échange d’une indemnisation, « le droit à diverses prestations en cas de maladie ou d’accident à l’étranger ». Prestation de services par le biais de créances cédées aux clients.
Rémunération des membres
Sans proposer directement à ses clients la conclusion d’un contrat d’assurance, il leur permet de bénéficier des services proposés par l’assureur au travers de l’adhésion à l’assurance groupe qu’il a souscrite. Problème, la société n’est pas agréée pour exercer l’activité d’intermédiation en assurance.
Elle nie toute activité de distribution devant les juridictions nationales. La Cour fédérale de justice allemande, devant laquelle l’affaire est pendante, a rendu une décision préjudicielle devant la CJUE, qui doit déterminer si l’entreprise est ou non un intermédiaire d’assurance au sens de la DDA.
« Un sociétaire qui souscrit un contrat d’assurance collective et le propose aux souscripteurs est-il un intermédiaire s’il n’est pas rémunéré directement par l’entreprise mais par les services qu’il propose à ses sociétaires ? résume Hugues Bouchetombe, avocat chez Kramer Levin.
Cela ne fait aucun doute pour la CJUE. « La perspective de cette rémunération représente […] un intérêt économique spécifique, distinct de l’intérêt des adhérents à bénéficier d’une couverture d’assurance découlant du contrat en cause, qui peut y inciter, compte tenu du caractère facultatif de la souscription au contrat, afin de obtenir un grand nombre de sympathisants », lit-on dans le jugement. Pour la Cour, la preuve en est l’engagement de collègues de porte à porte qui proposent d’adhérer à la convention collective.
Il est « indifférent » que le paiement soit effectué par les adhérents et non sous forme de commissions de l’assureur, ou que la personne morale concernée soit elle-même partie au contrat d’assurance groupe auquel elle incite ses clients à souscrire. L’IDD précise sur ce point que le statut de distributeur n’est pas incompatible avec celui d’assuré (ainsi que celui d’assureur).
« La CJUE examine tout d’abord si l’opérateur a ‘tiré de l’opération’, à savoir son propre intérêt économique. Les juges veulent éviter toute manœuvre évasive pour échapper au règlement DDA, même pour une ligne de touche », analyse Hugues Bouchetombe. L’arrêt souligne également la nécessité d’assurer une égalité de traitement et une concurrence loyale entre les opérateurs. Sur la base de la rémunération, les inspecteurs permettent également aux associations – notamment sportives – qui souscrivent une assurance collective de rester en dehors du champ d’application de la DDA.
« Cette solution pourrait aussi s’appliquer à l’assurance-vie, notamment l’assurance emprunteur », prévient Hugues Bouchetombe. C’est le pouvoir de DDA.
(1) 29/09/2022, affaire C-633/20