Par Henry GIRARD – h.girard@charentelibre.fr,

publié le 21 septembre 2022 à 19h43, modifié le 25 septembre 2022.

Séjours avortés, séjours non remboursables, familles d’accueil peu scrupuleuses… Les séjours linguistiques JEV Langues sont devenus un cauchemar pour certains clients de l’association, notamment aux Etats-Unis. Le patron de l’Angoumoisin, Jean-Michel Roques, condamné par le passé, se défend. Accédez gratuitement à notre enquête cette semaine.

Condamnation chez Silc, dépôt de bilan chez Sylvan et maintenant conflit avec les clients de JEV Langues. L’Angoumoisin Jean-Michel Roques, à la tête de cette association qui organise des programmes scolaires à l’étranger d’immersion en famille, se serait bien passé de cette mauvaise publicité. Débordée par la conjoncture économique actuelle, la structure spécialisée dans les séjours linguistiques, « leader du marché », croule sous les salves de parents d’élèves depuis la rentrée.

Adieu pom-pom girl

Critiques et plaintes, lisibles dans les commentaires sur les réseaux sociaux, se confondent : « A éviter », « Allez-y », « Prix exorbitants », « Ils vendent vos rêves pour finir par les briser ». Les témoignages font état de départs de fortune, de jeunes livrés à eux-mêmes, d’annulations de départs, parfois jamais remboursés et d’adolescents revenus en France, désormais sans solution d’orientation quand certains ne subissent pas le harcèlement de Jean-Michel Roques. Poursuivi par le passé pour abus de confiance (lire ci-contre), ce dernier évoque des « cas isolés », visant à ternir son image.

Dans la banlieue de Washington, le mobil-home est un peu miteux dans ce quartier prisé. Le frigo barbouillé de sauce tomate et Ben, un précepteur de 37 ans, qui passe ses journées devant la console, sans dire un mot, font un tableau un peu triste. Mathilde est déçue.

Loin des cheerleading et des drive-in entre amis, cette carte postale n’est pas tout à fait celle des brochures JEV Langues. « Je n’ai pas besoin d’une famille d’accueil américaine avec une maison à deux étages et une Ferrari dans le garage », déplore le père, Thomas Parenteau. Mais si vous payez 19 200 euros pour renvoyer votre fille, vous vous attendez à quelque chose de différent. »

Martine avait tout arrangé avant le 27 juillet, comme stipulé dans le contrat. « 12 000 euros, c’est l’économie d’une vie pour le projet de notre enfant, triste mère de famille. Elle l’a traversé à fond. Nous avons même payé les cours de langue du JEV le samedi matin pour 400 euros, dispensés par un professeur hindou. « A la mi-août, cette famille du nord de la France n’a toujours pas de nouvelles de l’organisme charentais, « pas de solution de placement alors que l’école avait déjà commencé sur place ». JEV n’a pas de famille d’accueil à proposer au 1er septembre, mais apporte une solution dans « l’école frontalière, un internat, généralement plus cher mais sans aucun frais d’avance ». Martine, déçue, refuse. Sa demande d’indemnisation vacille, « c’est même silence radio »: « Mon mari doit travailler la nuit pour payer lui-même. Nous n’avons plus le choix, nous envisageons des poursuites judiciaires. »

Mise en demeure

Pour les langues JEV, le phénomène est marginal et « tous les remboursements ont été effectués ». Une trentaine de familles auraient réclamé le paiement des avances, qui ont toutes été indemnisées, selon le dirigeant. « Sinon, on a eu plusieurs problèmes avec d’autres maisons, c’est vrai », raconte Jean-Michel Roques. Les États-Unis connaissent une vague de grande résignation et l’inflation a conduit à une situation de blocus partiel. Les familles aggravent les situations pour prouver que nous ne faisons pas notre travail, mais ont été appelées pour toutes les alternatives. »

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Pourtant, sur les réseaux, les messages abondent. Peu de parents osent témoigner, parfois de peur de ne jamais voir les grosses sommes. « J’ai signalé les pannes sur un simple rapport Google, sans jamais entrer dans les détails », raconte un autre père de famille. J’ai immédiatement reçu une lettre de mise en demeure me demandant expressément de la retirer sous peine de poursuites judiciaires. Loin d’être inquiétante, cette attitude m’a juste rappelé une association acculé. La lettre est signée par l’avocate Sophie Robin-Roques. Elle n’est autre que la compagne de Jean-Michel Roques. D’autres parents décident alors de surmonter les menaces.

10 août. Isabelle Vernet effectue un atterrissage d’urgence quelque part entre Chicago et Détroit. « Ma fille Roxane est menacée d’expulsion, on lui dit que son visa est valable jusqu’en juin 2023 mais n’est pas actif. Selon JEV, elle est arrivée dans la zone tôt à 17 heures, sans un accord écrit signé avec une famille au préalable. »

La mère de famille retourne alors les disques sur place, assurant qu’en parallèle « elle a des amis américains prêts à accueillir Roxane dans une grande maison, mais JEV ne veut rien entendre » : « Je n’ai pas de détails sur ce que on paye sur ce fameux 12 000 $. C’est simple, on ne nous a pas proposé de solution, si ce n’est d’ajouter 10 000 $ pour participer à un programme « sélect ». Pour eux, c’était le seul moyen de rentrer aux États-Unis. Isabelle attend toujours sur remboursement de ses dépenses.

Accusations rejetées par JEV Langues mais le responsable admet que nos demandes ne sont pas une « surprise ». « Nous envoyons près de 800 enfants partout dans le monde », conclut Jean-Michel Roques. Personne ne peut profiter de ses propres corruptions. Les parents ne comprennent pas que nous vendons un concept, pas un produit. Nous n’allons pas choisir les chantiers à vaincre. »

2011 : Jean-Michel Roques, débouté en cassation, perdait gros

Puis sur sa page Facebook le 12 septembre, JEV avait alors eu ces quelques mots : « Les équipes sont désolées de voir que quelques haters [« haineux », en anglais, ndlr] s’acharnent sur les réseaux sociaux pour aujourd’hui détester ce qu’ils aimaient hier. .” Fin de l’irrecevabilité.

L’Office national de garantie des séjours linguistiques et éducatifs : « Nous ne pouvons aller plus loin »

En février 2011, la justice tourne une page. L’affaire entre l’association angoumois qui organise des séjours linguistiques, le Silc, et son ancien directeur des années 1990, un certain Jean-Michel Roques, trouve une issue. La Cour de cassation a par la suite rejeté le pourvoi formé par l’actuel patron de JEV Langues après sa condamnation en appel à Bordeaux le 11 février 2010. Jean-Michel Roques, désormais définitivement condamné à dix mois de prison avec sursis, deux ans de sursis d’entreprise ou une association et une amende de 15 000 euros, Silc doit verser un peu plus de 440 000 euros de dommages et intérêts pour abus de confiance. La plainte a été déposée début 1999 par Jean-François Vieira et Didier Pitcho, deux entrepreneurs angoumois qui ont racheté l’entreprise avant de la revendre à Jean-Luc Maury-Laribière. Plus tard, en 2008, la marque américaine Sylvan, destinée au tutorat qu’elle tente d’implanter en France, est placée en redressement judiciaire après avoir déposé son bilan. Un écart de plusieurs millions d’euros où les franchisés de la salle pointent du doigt les « fausses promesses et baratins » du gérant (CL du 17 septembre 2008).