Auteur prolifique d’ouvrages sur la prière et les saints, poète et essayiste québécois a publié une autobiographie spirituelle, In His Presence. Une occasion pour lui de nous révéler les secrets de son intimité avec Dieu.
Qu’il est exquis d’écouter Jacques Gauthier. Non seulement parce que son accent québécois nous fait vibrer et nous met de bonne humeur, mais parce que ses paroles sont aussi poétiques, spirituelles et dépouillées que sa foi. Il rend la prière si facile. Poète et essayiste aux quatre-vingts livres sur la spiritualité, de passage en France pour promouvoir son autobiographie spirituelle In His Presence, aux éditions Artège, il n’a pu résister à l’envie de venir raconter à la famille chrétienne, dont il fut jadis le chroniqueur, un longue compagnie de Dieu dans sa vie.
Votre livre s’intitule En sa présence. Vous qui priez depuis très longtemps, que ressentez-vous à l’intérieur lorsque vous vous tenez en présence de Dieu ?
Très souvent, comme beaucoup de fidèles, je ne ressens rien sur le plan émotionnel ! Mais je sais que c’est là. C’est la foi, la foi nue. Sachant que je suis en sa présence.
Ce n’est pas bien de ressentir, mais c’est bien d’avoir un cœur profond. Bien sûr, je ressens parfois des dilutions mineures. À de tels moments, je ressens une grande paix et un silence profond sans aucune distraction. Ces moments rares sont de vrais cadeaux. Le danger est de croire que le lendemain on revivra la même chose, et on se décourage quand les perturbations et la sécheresse reviennent. C’est pourquoi sainte Thérèse d’Avila a dit que dans la prière il ne faut pas chercher la grâce de Dieu, mais le Dieu de la grâce. Regardez-Le, au-delà de tout ce que vous pouvez ressentir, de tout ce que vous pouvez conceptualiser ou de tout ce que vous pouvez expérimenter. Il est au-delà de tout. Soyez simplement présent en sa présence, car il nous a promis qu’il serait toujours avec nous : « Mais je suis toujours avec vous, jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20).
Alors, comment répondez-vous aux gens qui veulent rencontrer le Christ en personne et disent qu’ils ne sentent pas sa présence ?
Je leur dis qu’ils sont solidaires de ce que vit le monde. Le monde non plus ne ressent rien. Et nous, notre prière serait toujours dans l’extase, serions-nous toujours dans la joie quand il y a tant de jeunes qui se suicident, tant d’avortements, tant de souffrances, tant d’addictions ? ça va pas bien ! Vivre la sécheresse dans la prière, c’est être solidaire avec nos contemporains et partager en quelque sorte le poids du monde. Dans la sécheresse de la prière, nous sommes profondément missionnaires. Regardez Thérèse de l’Enfant-Jésus : dans toutes ses prières, elle sentait la sécheresse et l’aridité. Mais c’est une petite sainte qui rayonnait beaucoup et égayait son entourage. C’est une croix de persévérer quand on ne ressent rien. Mais plus nous sommes sur la croix, plus notre joie devient forte et profonde.
Mais ces personnes voudraient vivre une conversion étonnante, recevoir un signe de Dieu…
Les conversions ne sont pas toutes pareilles et ne dépendent que de Dieu. Le mien était un étourdissement – une lune de miel, j’aime à dire. D’autres ne ressentent rien ou pensent ne rien ressentir. Ces personnes doivent être accompagnées pour apprendre à discerner la présence de Dieu dans leur vie : « Voyez-vous la paix que vous avez et que vous n’aviez pas avant ? « , « Tu ne penses pas que quelque chose a changé en toi ? Mais, je le répète, Dieu est au-delà de la raison. Certaines personnes dirigent toutes les retraites à la recherche d’une expérience saine. Ils recherchent des sentiments pour leur âme, qui disparaissent aussi vite qu’ils apparaissent. Notre âme a besoin de plus : être satisfaite devant Dieu, dans la foi nue, dans le silence et le désert. Nous ne sommes pas tous des ermites, me répondrez-vous, mais nous pouvons tous, dans le métro, au travail ou à la maison, fermer les yeux pour descendre dans nos cœurs et simplement le remercier.
Que diriez-vous à une personne qui voudrait persévérer dans le feu de Dieu, mais qui passe une nuit de foi ou qui est plongée dans une acidité totale ?
Je lui dirais : essaie d’avancer comme si de rien n’était, ne gâche pas tout, fais confiance. La messe est faite ? Tu y vas quand même, et puis c’est dommage si tu es maigre, si tu cries au Seigneur. La grâce, c’est quand le Seigneur nous manque. Demandons-nous : Le Seigneur nous manque-t-il ? S’il nous manque, c’est parce qu’il est présent avec nous, sinon nous ne souffririons pas de son absence. Il est beaucoup plus proche de nous dans nos nuits. Elle est beaucoup plus proche de nous quand on sent qu’elle n’est pas là. Et si nous sommes déjà sortis ou si nous avons tout abandonné, nous reviendrons. Nous continuons à revenir parce que nous continuons à recommencer. Nous marchons dans la foi sans cesse. Nous sommes débutants, nous commençons tout juste. Chaque matin a son propre début. Chaque jour suffit à votre joie. Dites-vous que le Seigneur sait ce que vous traversez. Un jour, il vous rejoindra. Et si vous revenez à Lui, vous pleurerez comme les autres, car vous vous êtes éloignés de la source, et nous ne pouvons pas donner cette eau vive au cœur si nous ne buvons pas à la source. Et cette source, c’est Lui.
N’avons-nous pas parfois une recherche de Dieu trop sophistiquée, trop intellectuelle ?
C’est vrai, nous-mêmes sommes un peu trop dans cette recherche, mais Dieu est là, partout. Premièrement, il est constamment et simplement présent dans sa parole. Il est à portée de main et suffisant pour nous nourrir. Certains courent aussi toujours après quelque chose de nouveau, comme ce nouveau livre qui vient de paraître et qui serait forcément meilleur que l’ancien ou nous montrerait mieux le chemin vers Dieu. Mais un livre d’il y a cinquante ans ou trois siècles est aussi bon qu’aujourd’hui. Les enluminures sont de saint Jean de la Croix, de saint Bernard, de saint Augustin ou des pères de l’église, très actuels. Pourquoi serait-il obsolète ? Ces auteurs sont des amis et des lumières de ma foi. N’ayez pas peur de vous en tenir aux classiques !
Une vie inhabituellement ordinaire
Qui se cache derrière le théologien et poète, auteur de plus de quatre-vingts livres diffusés dans le monde entier ? Dans Un beau jour, un podcast familial chrétien, Jacques Gauthier raconte son histoire, celle d’un homme assoiffé qui, après une conversion radicale à l’âge de 20 ans, voulait tout donner à Dieu, mais le Seigneur l’attendait dans le vallée. vie ordinaire. De son enfance harmonieuse à son adolescence tourmentée, de sa vie de hippie dans la Trappe d’Oka au Québec, de son mariage heureux à sa carrière d’écrivain, nous avons droit au témoignage inspirant d’un homme qui suit les traces de sainte Thérèse pour nous révéler la Dieu extraordinaire dans chaque chose ordinaire.& #xD;
L’épisode 37 d’Un beau jour est disponible à partir du samedi 22 octobre, sur famillechretienne.fr, dans la rubrique Podcasts, et sur toutes vos plateformes d’écoute.
Le culte de la performance nous hante aussi dans nos vies spirituelles. La prière réussie, ça existe ?
La vraie prière commence juste au moment où vous sentez que vous perdez la tête ou que vous ne priez pas ! Le plus grand effort dans la prière n’est pas de prier, mais de s’abandonner complètement. Perdre contrôle. Saint Paul nous dit : « Nous ne savons pas prier correctement » (Romains 8 :26). Mais « le Saint-Esprit vient secourir notre faiblesse » et « intercède pour nous » par le cri : « Abba ! papa! Le succès de la prière ne vient jamais de nous, mais de l’Esprit Saint qui nous forme.
Mais nos distractions n’annulent-elles pas l’œuvre du Saint-Esprit ?
Au contraire, lorsque des perturbations sont présentes, cela signifie que nous ne sommes pas encore morts (rires). Je prie personnellement avec mes distractions. J’en ai beaucoup tout le temps. Ils enchantent mes nuits d’hiver : il ne faut pas oublier d’acheter ceci, de répondre à cette personne, d’aller à la Famille Chrétienne… [rires]. Je transforme toutes ces distractions en prière. Il est certain qu’à la fin on a l’impression d’avoir complètement abandonné sa prière. Mais n’est-ce pas ce que Dieu voulait pour moi aujourd’hui ? Ne lui ai-je pas dit au début de ma prière : « Pas ce que je veux, mais ce que tu veux » ? Ce n’est pas mon problème si ça me dérange. Moi, je n’ai rien fait de mal. Ma conscience est claire, tout va bien. Dieu est celui qui décide de ce qu’il veut me donner : la parole de son esprit, la distraction ou la sécheresse. Le fruit de ma prière ne m’appartient pas.
Quel est le plus grand danger pour notre vie spirituelle ?
S’habituer à. Pour que je ne me pose plus la question. « Tout passe dans le temps », chantait Léo Ferré. Nous allons à la messe parce que nous l’avons toujours fait quand nous n’avons même plus un cœur pauvre en nous. « Quelque chose de pire que d’avoir une âme, même perverse, c’est d’avoir une âme gaspillée », disait Charles Péguy. « Avec le temps on ne s’aime plus », a conclu Léo Ferré. C’est le danger du frère aîné dans la parabole du fils prodigue. Il y a aussi l’acédie, cette sorte de tristesse et de dépression de l’âme. Ce danger s’accroît car nos vies bien remplies nous y conduisent souvent. Chacun doit être attentif aux signes avant-coureurs et ne pas hésiter à aller se ressourcer avec une retraite ou lire un merveilleux livre spirituel pour se remettre sur les rails. Mais cela peut aussi être une grâce de faire l’expérience de l’acédie, car cela peut nous aider à changer, à nous remettre en question. Pour nous aider à comprendre que nous nous sommes tellement habitués à la grâce que nous en sommes devenus insensibles.