Ils sont une dizaine, venus de France, ont entre 16 et 18 ans et, comme tous les matins, retrouvent leur professeur, Steve Jackson, devant St Martin-in-the-Fields, une église qui surplombe Trafalgar Square. Ils partent pour une promenade studieuse dans la capitale britannique. C’est le principe de leur séjour linguistique : la rue, les commerces et autres stations de métro servent de salles de cours. Avec un objectif clair : perfectionner son anglais en échangeant le plus possible avec les Londoniens, en essayant d’utiliser immédiatement les mots et notions étudiés.
Aujourd’hui, le groupe traverse la Tamise pour rejoindre le quartier de South Bank et pousser les portes du théâtre national. Ouvert à toute heure, son café, aux longues tables en bois, offre un cadre confortable et accueillant pour le cours d’initiation donné par Steve Jackson. Cheveux oxygénés, vêtements d’une excentricité très londonienne, le professeur débute la séance par quelques exercices de conjugaison.
Avec enthousiasme, il invite ensuite ses élèves à lire un extrait d’un journal contenant, en gras, des mots d’argot. Il s’agit d’un mec, un « mec », qui fume un hêtre, une « cigarette », et auquel il manque visiblement un trait d’union, une « oseille »… Le groupe doit comprendre le sens de chaque expression, avant de la remplacer. avec des synonymes en anglais standard.
Quelques mots et un sourire
Vient ensuite le moment de se jeter dans le bain de langage profond en demandant aux passants de raconter, en argot, un événement marquant de leur vie. Antonin, étudiant en dernière année en voyage linguistique en Angleterre pour la troisième fois, a réussi à engager la conversation avec un Écossais de passage à Londres. Quelques mots, un sourire, ont suffi à l’homme pour commencer à lui raconter, avec insistance, un vol en hélicoptère effectué lors d’un voyage à Monaco…
« Nos étudiants sont encouragés à enregistrer la conversation sur leur téléphone portable afin qu’ils puissent l’écouter à nouveau », explique Jason West, le directeur de ce programme de deux semaines intitulé « English Out There ». Sa méthode, assure-t-il, permet de « fixer durablement le langage dans la mémoire en attachant des mots, des expressions, des tournures de phrases, à une personne, un contexte, des odeurs ». Il aide à acquérir des automatismes et surtout à vaincre les inhibitions.
Inhibitions
Inhibitions courantes chez ses élèves français, « souvent très bons à l’écrit mais mal à l’aise à l’oral », note Jason West. Une description dans laquelle Eugénie, 15 ans, se reconnaît assez bien. « Au lycée, dans une classe de 30, tu peux facilement te fondre si tu es timide, comme moi », avoue-t-elle. « Ici, je dois mobiliser verbalement ce que j’ai appris à l’école et dans les séries télé », poursuit la jeune fille, qui parle d’un « coup de pied au cul » bienvenu.
Découvrir Londres autrement, c’est aussi ce que propose l’organisateur de voyages CLC, en emmenant les enfants sur les traces d’Harry Potter pendant une semaine. En début d’après-midi, après une demi-journée de cours d’anglais basés en partie sur les romans du même nom, rendez-vous est pris à la gare de King’s Cross, sur le « quai 9 ¾ », l’un des lieux de tournage du film pris des livres. Tous les participants sont prêts à attendre une bonne vingtaine de minutes pour être photographiés avec le foulard officiel de l’une des quatre maisons de Poudlard, l’école des sorciers, devant le chariot à bagages lancé à toute vitesse à travers un mur de briques.
Immersion
Entre eux, Lina a lu tous les volumes de Harry Potter, dont certains sont en anglais. Et ses parents le voulaient bien en lui offrant ce séjour pour ses 15 ans. De la Cathédrale Saint-Paul, qui a inspiré la décoration des salles du château de Poudlard, au Pont du Millénaire, qui dans le film finit par s’effondrer, la visite de la ville, chez les Français, s’accompagne de commentaires en Français. ..
Mais cette jeune Alsacienne est dans une famille « très attentionnée », qui échange volontiers avec elle dans la langue de J.K. Rowling. Jusqu’où pousser l’immersion ? Quel équilibre entre apprentissage et activités récréatives ou culturelles ? Comment créer le clic ? A chaque cours de langue correspond sa formule, plus ou moins adaptée au profil de l’enfant.
Au Berkshire College, à 40 minutes en train de Londres, on mise beaucoup sur l’environnement traditionnel d’un établissement public qui, pendant les vacances, met ses installations à la disposition de 200 jeunes du monde entier. Lors de ce séjour, proposé par Nacel, on prend soin de briser les frontières entre les nationalités. Sur le gazon bien rangé du terrain de rugby, les Français – très nombreux – côtoient les Italiens, tandis que Turcs et Chinois s’associent au sein des équipes pour de fous « Jeux olympiques ». Ceux qui ne sont pas très sportifs pratiquent une comédie musicale dans le cadre d’un petit palais de style géorgien.
Colonie
L’ambiance est celle d’un camp pour 9-16 ans. De plus, les participants bénéficient de cours d’anglais, jusqu’à quinze heures par semaine. Des cours souvent basés sur la collaboration, comme aujourd’hui où, ensemble, il faut imaginer un projet dans le monde numérique. L’occasion d’acquérir un vocabulaire spécialisé et de présenter aux autres, quel site spécialisé dans le football, quelle application pour simplifier les achats.
« À leur arrivée, les enfants passent un test qui nous permet de les répartir en six groupes de niveau », explique le directeur du campus, Martin Corr. Chaque groupe suit simultanément des modules dédiés aux mêmes matières afin que les jeunes aient des matières communes en dehors de la classe. Puis à la fin, chacun passe un examen final et se voit décerner, lors d’une cérémonie, un diplôme homologué par le British Council et qui tient compte du cadre européen de référence pour les langues. Un véritable argument pour les parents d’aujourd’hui, de plus en plus exigeants.