Fête chrétienne : à "Bienvenue au paradis", le défi d'ancrer la foi chez les jeunes

« J’ai grandi dans une famille catholique, mais cette année j’ai senti un vide dans ma foi », commence Axelle, 18 ans, qui a les cheveux châtains attachés en chignon. Au cours de ma première année à l’école d’infirmières, j’étais entourée de nombreux incroyants. Je voulais venir ici pour renforcer ma foi. Assise sur des tréteaux avec d’autres jeunes, au milieu d’une pelouse ornée de guirlandes et entourée de trois chapiteaux, l’adolescente raconte à ses voisins les raisons de sa venue à la fête chrétienne Bienvenue au paradis. .

L’événement, organisé depuis 1993 par la Communauté du Chemin-Neuf dans le cadre idyllique de l’Abbaye d’Hautecombe (Savoie) surplombant les eaux turquoises du lac du Bourget, accueille plus de 2 000 jeunes chrétiens du 17 juillet au 12 août âgés de 18 à 30 – dont près de 1 000 étrangers. Cette année, le festival s’étale sur quatre semaines, contre une seule semaine les années précédentes, afin d’atteindre « une portée plus large », selon les mots de Mustapha Amari, directeur du festival et frère de la communauté.

Vacances et spiritualité

Vacances et spiritualité

« Le problème du déclin de l’Église n’est pas le message du Christ, mais la manière dont il est transmis », affirme-t-il. Dans ce contexte, la « jeune » équipe de la Commune du Chemin-Neuf a élaboré une formule « à la carte » destinée à « allier vacances et spiritualité », dans un cadre qui reprend tous les codes du festival : immenses tentes, couleurs fanions, campings dispersés et verres recyclables floqués. Avec des temps de prière le matin, un culte au monastère et une messe quotidienne à 12h15, célébrée sous la grande tente, façonnée par l’ADN charismatique de la communauté.

Autour de la table, à la fin du premier déjeuner ensemble – petits groupes d’une dizaine de festivaliers, constitués au hasard pour favoriser les rencontres – chacun témoigne de ce qu’il a trouvé à Welcome to Paradise. « Aujourd’hui, je ne sais pas si je me considère comme croyante, je ne sais même pas si j’ai la foi », confie Astrid, 18 ans. Je ne sais pas si je suis venue pour les bonnes raisons, car je suis surtout venue pour partager être avec mes cousins », sourit-elle aux côtés d’Axelle et Marie, 21 ans.

Ce dernier poursuit : « Cette année j’ai perdu des amis et je me suis senti très seul… J’ai commencé à prier plus régulièrement. Je cherche la paix intérieure ici », confie-t-elle, émue. Ensuite, Quentin, en t-shirt rouge et short de sport, avoue qu’il « ne sait pas pourquoi il est là ». « Je suis croyante depuis moins d’un an, j’ai voulu faire une retraite et j’ai appelé Hautecombe. Ils m’ont dit que le festival existait et m’ont invité à venir : j’ai dit oui », sourit-il, encouragé par son voisin : « C’est super courageux ! »

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Expérience forte

Expérience forte

Si la plupart des festivaliers sont des jeunes issus de familles de tradition catholique, certains plus éloignés de l’Église viennent ici chercher des réponses ou du moins une expérience spirituelle forte. Comme Paul, un étudiant de 23 ans arrivé « un peu par hasard » pour combler ses deux mois de vacances. « Je ne suis pas un fervent catholique et je n’ai pas une relation facile avec Dieu », avoue-t-il, sa casquette vissée sur la tête, ses yeux bleus perçants derrière des lunettes à monture noire. Ce n’est pas mon truc, mais je veux rester dans une démarche spirituelle, alors cette semaine je me donne l’occasion de voir, de me faire ma propre opinion. Au cours de la semaine écoulée, plusieurs jeunes non-croyants ont déclaré avoir ressenti « quelque chose » à la fin des cinq jours.

Tous les ingrédients sont réunis pour vivre des moments spirituels intenses que les jeunes portent dans leur foi. « Mon rêve secret serait de faire un festival gratuit pour les non-croyants parce que les non-croyants ne sont pas prêts à payer 200 € pour un événement chrétien », confie Mustapha à Amari, bien qu’une collecte de fonds ait réussi cette année à faire baisser le prix à 150 € la semaine, sans transport.

L’enjeu pour les organisateurs est avant tout de parvenir à ancrer cette passion chez les jeunes sur le long terme. « Beaucoup rentrent chez eux avec le feu, mais le perdent au fil de l’année », avoue le directeur du festival. En fait, l’événement de cette année accueille plus de 1 000 nouveaux venus – un nombre qui a causé une erreur dans le fichier informatique. Signe d’une certaine attirance mais aussi d’une difficulté à retenir les jeunes avec une pratique religieuse « à la carte ».

Des ateliers en lien avec l’actualité

Des ateliers en lien avec l’actualité

Au-delà des temps spirituels et des activités sportives et de loisirs, les journées des jeunes festivaliers sont rythmées par des « ateliers », des conférences avec des intervenants très différents. Du Père Philippe Demeestère au pasteur hollandais Henk Stoorvogel, en passant par Mgr Luc Ravel ou le Frère Aloïs de Taizé, les organisateurs ont voulu représenter différentes sensibilités de la chrétienté – dans l’esprit de l’œcuménisme, cher au cœur de la communauté du Chemin-Neuf . Parmi la longue liste des conférenciers, Jean-Marc Sauvé, président de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase), a fait le déplacement pour deux ateliers « Abus dans l’Église : écouter, reconnaître, reconstruire ».