– Modifié le 04/11/2022 à 09:27
Edito Véronique Margron – Gratitude Durée : 3 min
Chers amis, ce matin, je voudrais vous parler de mes sœurs. Surtout ceux qui vivent dans la maison de leur mère : ils sont tous partis en voyage il y a quelques jours. De ces vrais voyages qui ne veulent pas dire la même chose, dont on ne connaît pas l’itinéraire intérieur…
Chers amis, ce matin, je voudrais vous parler de mes sœurs. Surtout ceux qui vivent dans la maison de leur mère : ils sont tous partis en voyage il y a quelques jours. De ces vrais voyages qui ne veulent pas dire la même chose, dont on ne connaît pas l’itinéraire intérieur…
Une partie de la maison mère était dédiée à la production d’Ehpada en coopération avec la fondation, que je salue chaleureusement. Une maison ouverte au public modeste. Les sœurs les plus âgées ou à charge passent en premier. Avec eux aussi d’autres qui ont accepté de venir maintenant. Par amitié et solidarité avec les sœurs malades, mais aussi par souci pour les autres résidents qui arriveront dans les prochaines semaines et laisseront tant de choses derrière eux. Le souci de l’humanité, la proximité, la bienveillance, une communauté de paix et de partage tout simplement. Car tant de communautés religieuses vivent dans des maisons de retraite en France.
Laissez-moi vous dire que ces 24 vieilles dames – c’est-à-dire mes sœurs – ont entre 85 et plus de 100 ans, mon admiration. Déplacez-vous à nouveau. Pas tellement à l’extérieur, mais juste à l’intérieur. Rouvrir. Il y a quelques jours, nous avons célébré la fête de la Toussaint. Et ce 7 octobre sera le jour de la Toussaint dans l’ordre de Saint Dominique auquel j’appartiens.
Ainsi, chacun des visages de ces femmes me rappelle ce que le pape François a écrit dans son exhortation à la sainteté en 2019 : « saints voisins ». Ils sont de ceux-là. Non pas que leur vie soit parfaite, leur foi inébranlable et leur caractère impeccable. Mais parce qu’elles sont des femmes, elles sont pleinement humaines et elles se soucient de l’humanité de l’autre. Présence, en faiblesse de corps et parfois d’esprit, consolation pour ceux qui viennent trop seuls, trop loin de leurs proches, trop épuisés de la vie. Dans les profondeurs du bruit de l’existence – et leurs vies avaient aussi leur part de bruit – simplement être là. Vraiment. J’admire aussi ceux qui seront peu nombreux dans notre maison encore très grande et qui devront réinventer la façon de vivre les uns avec et pour les autres.
Tous ont travaillé et travaillé jusque tard dans leur vie. C’est une opportunité que beaucoup envieraient. En même temps, vous pourriez dire stop, maintenant laissez-nous tranquilles et attendez toutes vos transformations. Attendez qu’on parte. Mais non. Pour moi et pour d’autres, ils parlent alors de « zèle et d’audace », « d’endurance, de patience et de douceur », dont parle encore le Pape François.
« Un nouveau commencement par des commencements sans fin », écrivait le moine Guerric d’Igny au XIIIe siècle. Alors, toute ma gratitude et mon affection. Et si quelqu’un doute de la force du cœur qui demeure pour toujours et à jamais, il suffirait de se souvenir de ces paroles – parmi les plus belles de la Bible – que Dieu adressa au petit Gédéon dans le livre des Juges (6, 14) : » Allez avec ce pouvoir que vous avez. »