Une enquête de Libé nous apprend comment l’apprentissage est devenu un juteux marché pour des fonds d’investissements qui profitent des failles d’une loi peut être trop généreuse…

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Une enquête menée par Marie Piquemal de Libé qui nous apprend comment l’apprentissage cher au président de la République est devenu un business lucratif pour des fonds d’investissement qui exploitent sans vergogne les failles d’une loi parfois trop généreuse. 11,3 milliards d’euros dépensés rien qu’en 2021. Une enquête basée sur des rapports publics mais aussi des témoignages directs de personnes qui travaillent pour ces fonds d’investissement, écoeurées par un système qui nuit aux jeunes et à leur formation… Ou comme l’apprentissage est pavé de bonnes intentions , retour sur cette relation avec Marie Piquemal

Marie Piquemal : En fait, c’est parce que j’avais fait une première partie sur la restructuration de l’enseignement supérieur. Ce que nous faisons aujourd’hui, nous avons un étudiant sur quatre dans l’enseignement supérieur privé, donc dans les écoles privées. Et une bonne partie d’entre eux sont détenus par des fonds d’investissement, certains très agressifs, mais qui sont en réalité là pour faire, pour gagner de l’argent. Et j’avais fait une première partie sur Surça. Et lors de cette première enquête, il est apparu assez clairement que l’apprentissage, pourtant fortement soutenu depuis plusieurs années par le gouvernement, était pour les organismes de formation privés gérés par des fonds d’investissement, une formidable porte d’entrée pour augmenter leur nombre d’étudiants. Pour une raison assez simple, la formation est payée avec la taxe d’apprentissage et est donc aussi une aide publique. Et donc cela permet au jeune d’avoir sa formation qui est gratuite.

Un avantage pour les fonds d’investissement. Au lieu de se limiter à un petit vivier d’étudiants dont les familles ont les moyens de payer sept ou huit mille euros par an pour se former, l’apprentissage élargit la clientèle et permet de toucher les classes moyennes et populaires qui jusqu’alors n’avaient pas accès à ces formations privées. Le résultat est qu’en trois ans les apprentissages en France passent de 300 à 730 000 personnes. Une manne financière non sans excès. Dans son enquête, Marie Piquemal raconte comment l’association Sos Apprentis est devenue, je cite, la « bénéficiaire d’abus en tout genre ». Avec, par exemple, le cas de ce Nino de 26 ans qui entre en cuisine comme apprenti, et qui se retrouve, au bout de quelques semaines, à travailler à plein temps, avec, uniquement pour l’enseignement donné par son CFA, son Formation des apprentis, quelques vidéos en ligne.

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Marie Piquemal : Pour bien comprendre, il faut remonter à 2018 – 2017. Quand Emmanuel Macron a été élu, il a lancé un premier projet : la réforme de la formation professionnelle et de la formation continue et initiale par l’apprentissage. Et à ce moment-là, en fait, il l’ouvre, lance la réforme et ouvre complètement les vannes. Ainsi disent les syndicats de l’époque. Avec un principe assez simple, c’est que le revenu reste le même, c’est-à-dire la taxe d’apprentissage. N’importe qui, en revanche, peut devenir CFA, c’est-à-dire centre de formation d’apprentis, et donc accueillir des apprentis. Faites simplement une déclaration très simple et vous pourrez recevoir des fonds publics pour soutenir l’apprentissage. Donc, en fait, nous avons massivement augmenté les dépenses sans nécessairement augmenter les revenus. Ce qui fait que l’État aujourd’hui est vraiment obligé d’épargner et de ne pas arrêter de livrer des milliards et des milliards. Il a mis 2 milliards cet été, ils ont donné 2 milliards il y a quelques semaines pour essayer de maintenir cette organisation à flot, mais sans grand succès.