Discours du Président Charles Michel à la réunion de coordination semestrielle de l'Union Africaine

C’est un plaisir d’être avec vous aujourd’hui. Je tiens à vous remercier de m’avoir fait l’honneur de m’adresser à vous. Un chaleureux merci au Président Hichilema pour son aimable hospitalité dans son beau pays. Et un merci spécial à Macky Sall et Moussa Faki pour l’aimable invitation.

Il y a exactement cinq mois, nous, dirigeants européens et africains, étions réunis à Bruxelles pour un sommet exceptionnel. Ensemble, nous avons décidé d’un nouveau paradigme, un nouveau logiciel pour notre partenariat stratégique, un logiciel ancré dans les principes de respect mutuel, d’intérêts communs, de valeurs partagées et d’égalité sincère entre partenaires.

Nous partageons la même ambition : construire ensemble pièce par pièce un espace commun de paix, de sécurité, de prospérité et de progrès. C’est notre promesse commune; cela doit être notre devoir commun envers les jeunes générations d’Afrique et d’Europe.

Et maintenant, nous devons tenir nos engagements et c’est précisément ce que nous avons commencé à faire ensemble, à travers des partenariats respectueux et de qualité. Le but de notre partenariat est de créer des liens, pas des dépendances, des liens forts pour relever ensemble les défis.

Soyons concrets. Il y a quelques mois, nous avions des positions divergentes sur la propriété intellectuelle des vaccins. A Bruxelles, on s’est promis de trouver une solution ensemble avant l’été, et on l’a fait ! Un merci spécial à notre chère soeur Dr. Ngozi : sous votre direction, nous, Africains et Européens, trouvons ensemble l’équilibre entre la propriété intellectuelle, l’innovation scientifique et l’accès universel à la technologie.

C’est le même esprit qui nous guide dans le développement des capacités de production de vaccins et de médicaments sur le sol africain, et des projets sont déjà en cours au Sénégal, au Rwanda, en Afrique du Sud et au Ghana.

Cette ambition ne se limite pas au « fill and finish » : les technologies les plus récentes et les plus prometteuses sont transférées. Nous travaillons avec vous pour que ces vaccins soient achetés à l’international, via GAVI/COVAX par exemple.

Vous avez décidé de créer la zone de libre-échange continentale. Renforcer l’intégration commerciale et économique relève du bon sens et c’est aussi la voie choisie par l’Union européenne depuis de nombreuses années pour construire le marché intérieur. Il n’est donc pas surprenant que nous soyons prêts à vous soutenir.

Mesdames et Messieurs, chers amis, vous avez fait le choix de l’intégration économique et, comme l’a parfaitement dit le président Hichilema lors du dîner d’hier soir, notre objectif commun est de promouvoir la prospérité par l’investissement, la coopération économique, le commerce, non pas de partager la pauvreté, mais de partager la prospérité équitablement. C’est dans cet esprit que le projet Global Gateway, présenté à Bruxelles il y a cinq mois, vise à mobiliser 150 milliards d’euros pour mettre en œuvre des investissements qui favorisent et soutiennent cette capacité de prospérité et de développement économique.

Soyons concrets : les interconnexions électriques, par exemple, entre la Zambie et la Tanzanie. Nous en aurons parlé, Monsieur le Président, entre l’Angola et la Namibie, la RDC et la Zambie, des investissements massifs dans le gigantesque potentiel des énergies renouvelables, comme, par exemple, le développement de l’hydrogène propre en Namibie et ailleurs. Des investissements ont été réalisés dans le transport routier et ferroviaire pour connecter et rapprocher les gens. Le projet, par exemple, Dakar-Abidjan ou Mombassa-Kisangani. Voilà quelques-uns des exemples concrets pour lesquels il y a, pour chacun de nous, une exigence de responsabilité. Exigeons-nous d’abord et veillons à transformer rapidement des projets papier en projets concrets qui transforment véritablement le quotidien des femmes et des hommes.

Tout cela a été parfaitement dit par le président Hichilema il y a quelques instants. Sécurité et prospérité, paix et prospérité sont les deux faces d’une même médaille, je voudrais dire que ce sont les deux faces d’un même masque. La paix et la stabilité sont, bien entendu, le fondement nécessaire du développement économique et social et du dialogue politique. Les échanges d’analyses, la modeste conscience qu’il existe rarement, voire aucune, des solutions toutes faites, prêtes à l’emploi, et la conscience que chaque situation nécessite des solutions adaptées et sur mesure. Ce sont ces principes de bon sens, me semble-t-il, qui doivent inspirer notre intelligence collective. Je veux le dire solennellement et loyalement : l’Union européenne est prête à soutenir les efforts africains pour prévenir et résoudre les conflits et consolider la paix quand ils le souhaitent. C’est le sens, par exemple, du programme approuvé par l’Union européenne pour l’Afrique de 600 millions d’euros au titre du mécanisme européen de soutien à la paix qui peut être et est mobilisé, par exemple au Mozambique, en Somalie ou au Sahel. exemples.

Je me tiens devant vous à un moment particulier de l’histoire du monde. Le président Moussa Faki l’a parfaitement dit : nous sommes confrontés à des difficultés, des crises, des défis, ils sont multiformes. Dans la nuit du 23 au 24 février, un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, qui dispose de l’un des plus grands arsenaux nucléaires, a tiré 1 600 missiles et roquettes en quelques heures contre la population d’un État souverain de 40 millions d’habitants. Cette guerre impérialiste d’un autre siècle est une violation flagrante du droit international. Ce sont les principes mêmes de souveraineté et d’intégrité territoriale établis, je dirais même consacrés, dans la Charte des Nations Unies qui sont brutalement bafoués.

Les historiens écriront l’histoire, mais c’est aux gouvernants et aux politiques d’en tirer aujourd’hui les enseignements nécessaires et utiles. Je veux partager avec vous cette conviction sincère : l’histoire l’a montré, le meilleur rempart contre l’unilatéralisme brutal et la tentation de la loi du plus fort, c’est la promotion du multilatéralisme et de la coopération internationale, c’est le meilleur antidote à la guerre, c’est le meilleure garantie de paix et de prospérité. Et c’est précisément cet esprit de coopération et de respect mutuel qui est le cœur battant de l’Union africaine, qui est le cœur battant de l’Union européenne. Cette guerre, bien sûr, met à l’épreuve le continent européen, la sécurité du continent européen. Certes, dans les semaines et les mois à venir, les défis énergétiques pour l’Europe et le reste du monde seront colossaux. Nous savons tous ici, et vous le savez mieux que quiconque, que les conséquences de cette guerre sont mondiales et extrêmement graves.

Les peuples africains, et c’est injuste, sont aussi les victimes directes de ce conflit. En fait, à travers cette guerre, des armes à sous-munitions ont été lâchées contre la sécurité alimentaire mondiale. Les faits sont têtus, ce sont des navires de guerre qui bloquent l’accès à la mer Noire pour le transport de produits agricoles en provenance, par exemple, d’Ukraine ou pour les engrais. Ce sont des champs de blé transformés en champs de bataille par des chars et des mines. Ce sont le vol des produits agricoles et la destruction des infrastructures qui sont la cause directe de cette crise alimentaire qui s’aggrave sous nos yeux. Et je tiens à le dire solennellement : l’Union européenne n’a imposé aucune sanction contre les produits agricoles ou les engrais russes. Je le dis aussi avec la même solennité : l’Union européenne travaille dur pour calibrer nos décisions afin d’éviter des effets négatifs que nous ne voulons absolument pas. Au contraire, nous travaillons avec tous les partenaires pour ne pas rester les bras croisés, pour que nous agissions concrètement pour surmonter cet obstacle et ce défi qui vous touche et qui nous touche ensemble.

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Avant tout, nous nous engageons à mobiliser une aide humanitaire d’urgence pour les populations vulnérables. Permettez-moi d’être concret avec vous. Plus d’1 milliard d’euros dans les régions du Sahel et du lac Tchad ; 600 millions d’euros pour la Corne de l’Afrique ; 225 millions d’euros pour aider nos partenaires d’Afrique du Nord, et nous venons d’annoncer 600 millions d’euros supplémentaires pour tous les pays de la région Afrique, Caraïbes et Pacifique. C’est un premier point.

Deuxième élément : Monsieur Sall, j’ai pu m’entretenir avec vous et d’autres collègues il y a quelques semaines en marge de la réunion du G7. Peut-être devrions-nous nous inspirer du succès des projets que nous avons menés ensemble en matière de production de vaccins sur le sol africain, pour agir et redoubler d’efforts pour soutenir la production agricole en Afrique et faire en sorte que l’accès aux intrants, y compris les engrais, soit un réalité. C’est sur ce sujet que je pense qu’on devrait pouvoir se mettre immédiatement à table, faire preuve d’un leadership partagé pour transformer cette idée, s’ils le souhaitent, en un projet opérationnel concret qui puisse être exemplaire, qui puisse contribuer à répondre à cette défi auquel nous sommes confrontés. La souveraineté agricole de l’Afrique et les intérêts de l’Afrique sont également dans l’intérêt de l’Union européenne. Je voudrais dire à Macky Sall, il le sait, que lorsqu’il évoquait il y a quelques jours ces chiffres impressionnants, selon lesquels l’Afrique utilise près de huit fois moins d’engrais à l’hectare que l’Union européenne, sont des chiffres qui devraient nous faire réfléchir, notamment au niveau européen.

Troisième élément, bien sûr, nous nous engageons à soutenir les initiatives internationales dans le cadre du G7. Nous devons également soutenir ce projet porté par la présidence française de l’Union européenne, le projet FARM, qui mobilise des capacités concrètes, vous le savez, pour agir ensemble.

Enfin et surtout, je tiens à le dire ici aussi, nous soutenons pleinement les efforts du secrétaire général des Nations unies, António Guterres, pour ouvrir le plus rapidement possible les corridors maritimes à travers la mer Noire pour permettre enfin, le plus exporter au plus vite ces millions de tonnes de blé, de céréales, de grains bloqués en Ukraine et en Russie, pour aussi libérer la capacité de rétablir les chaînes d’approvisionnement nécessaires, notamment pour les engrais. Il s’agit d’une question vitale et nous soutenons activement et sans réserve les efforts d’António Guterres à cet égard.

Vous le voyez, c’est concrètement que notre partenariat doit se concrétiser et se développer. Il y a une autre pensée que je veux partager avec vous avant de conclure. Quand l’Afrique et l’Europe le veulent, ensemble nous pouvons être une force puissante. Quand nous agissons avec complicité, avec complicité, avec confiance dans les enceintes internationales. Par exemple, le compromis du Sommet de Bruxelles sur ce rôle du gaz dans les transitions énergétiques, ce compromis que nous avons élaboré ensemble en nous écoutant, en mobilisant l’intelligence collective, en comprenant les priorités de chacun et la volonté de se rapprocher pour les rassembler dans un esprit fort , ambitieuse et utile, eh bien, ce compromis que nous avons élaboré ensemble lors de la conférence de Bruxelles a été repris tel quel, exactement tel quel, dans la déclaration du G7 il y a quelques jours et je pense qu’il inspirera les travaux préparatoires de la COP 27 qui aura lieu en Égypte. Je suis sûr que nous pouvons compter sur une coopération forte entre l’Europe et l’Afrique pour concilier l’ambition climatique avec le besoin légitime de l’Afrique de mobiliser rationnellement ses ressources, y compris les hydrocarbures, au profit du développement. Et il y a, il faut le dire, une profonde injustice : que l’Afrique, qui est responsable de moins de 3% de la production de gaz à effet de serre, ait été empêchée de mobiliser ne serait-ce qu’une partie de ses ressources pour combler le Gap énergétique = Ils s’en vont.

Je conclus : ensemble, l’Afrique et l’Europe représentent un potentiel de développement sans précédent pour le XXIe siècle. Ensemble, Afrique et Europe, nous avons le dynamisme, nous avons le talent, nous avons le savoir, nous avons l’ingéniosité pour plus de prospérité et plus de stabilité. Ensemble, et si nous le choisissons, nous pouvons unir et rassembler ce pouvoir afin que notre peuple puisse partager les bénéfices. Encore une fois, ne pas partager la pauvreté, mais partager la prospérité. Et c’est pour cette raison que je voudrais dire solennellement ici que je soutiens de tout cœur l’appel lancé par le président Macky Sall au nom de l’Union africaine pour garantir à l’Afrique une place au sein du G20. Il est juste que le continent africain ait toute sa place et soit partie prenante des décisions qui l’impactent et le façonnent. Ensemble, l’Afrique et l’Europe peuvent former un arc de paix, de prospérité, de coopération pour ce 21ème siècle, j’en suis convaincu, j’en suis intimement convaincu dans ma chair et dans mon cœur, notre partenariat stratégique est plus que jamais essentiel. C’est une offre positive, sincère, juste et tournée vers l’avenir. Le leadership, le respect mutuel et la confiance peuvent être l’épine dorsale de ce partenariat. Leadership, respect mutuel et confiance sont l’âme de ce partenariat stratégique. Merci pour votre attention.