Décès d'Elizabeth II : Lorsque la reine d'Angleterre fit sa première visite en France à Lille et

La reine Elizabeth II effectue sa première visite officielle à l’étranger du 8 au 11 avril 1957. Elle choisit la France et, exceptionnellement, passe sa dernière journée de voyage hors de la capitale. A Lille, il vient rendre hommage à une ville de résistants. A Roubaix, il viendra saluer une industrie textile à son apogée.

La reine Elizabeth II est décédée le 8 septembre 2022 à l’âge de 96 ans. En 70 ans de règne, il aura eu quinze premiers ministres et vu neuf présidents français. Le Royaume-Uni a célébré son jubilé de platine du 2 au 5 juin 2022. Elizabeth II a été le premier monarque du pays à en célébrer un. Il avait déjà battu le record de longévité de son arrière-arrière-grand-mère, la reine Victoria, en 2015. Elizabeth II monta sur le trône l’année de ses 25 ans, en 1952. Sa cérémonie de couronnement fut alors télévisée dans cinq pays européens, une première mondiale.

Elizabeth II portait avec elle une réputation de femme froide, très attachée à l’étiquette, et dont la rigidité a été fustigée lors du conflit de plus en plus ouvert avec le prince Harry et l’actrice Meghan Markle. Mais Elizabeth II était aussi connue comme une femme atypique et courageuse. En 1942, elle a 16 ans et s’inscrit à l’agence pour l’emploi britannique, la Bourse du travail, déterminée à rejoindre une division féminine et à participer à l’effort de guerre.

La famille royale, et son père en particulier, commencent par refuser, mais succombent à la détermination de la jeune femme. Il travaille comme mécanicien de camion et chauffeur d’ambulance.

Elizabeth II était également connue pour son esprit vif et son humour anglais impassible. Plusieurs livres lui ont été consacrés, comme « Elisabeth II ou l’humour souverain », aux éditions Albin Michel. On lit par exemple cette anecdote : « En 1986, lors d’un voyage en Nouvelle-Zélande, où la reine est toujours chef de l’État, deux femmes ont jeté des œufs sur la voiture royale, s’écrasant sur le manteau rose de Sa Majesté. D’abord choquée par l’agression, il a plaisanté plus tard: « Personnellement, je préfère les œufs au petit-déjeuner. »

Du 8 au 11 avril 1957, Elizabeth II réserve sa première visite officielle en France en tant que reine. La première partie du voyage se déroule évidemment à Paris, où la reine et son époux, le prince Philip, sont accueillis en grande pompe par le président René Coty et visitent Versailles, l’Opéra de Paris, le Louvre… Mais la dernière Le jour de son voyage, qui est rare, n’est pas dédié à la capitale : le 11 avril, Elizabeth II achève sa visite officielle à Lille et Roubaix.

A Lille, le couple royal est reçu avec tous les honneurs à la préfecture de Lille. Nous emmenons la Reine Elisabeth flâner dans le marché aux fleurs qui se tient sur la Grand Place. Le programme laisse place à un moment plus solennel : le dépôt d’une gerbe sur le monument aux morts de la place Rihour. Cela touche à l’une des raisons de la présence d’Elizabeth II à Lille. En 1957, la Seconde Guerre mondiale était encore fraîche dans tous les esprits et la capitale des Flandres jouait un rôle très particulier pour les Britanniques.

À Lire  Hôtel Villa Le Blanc, Gran Meliá à Minorque, avis d'expert Le Figaro

Très industrialisée, la région lilloise était un centre stratégique pour les Allemands et fut continuellement occupée entre 1940 et 1944. La ville ne tomba qu’après une résistance armée acharnée, qui permit à la plupart des soldats du corps expéditionnaire britannique de se battre en Flandre. A Lille et ses environs, les contingents allemands sont nombreux pendant quatre ans et les plaines du nord ne permettent pas l’organisation des mêmes poches de résistance que dans le maquis méditerranéen.

Mais les Lillois, malgré leur marge de manœuvre limitée, feront tout pour rendre la vie de l’occupant allemand bien plus difficile. Le sabotage des usines et des chemins de fer, ainsi que les assassinats ciblés d’officiers allemands, ne sont pas rares. Les grèves sont aussi un autre moyen de résistance, comme la grande grève des mineurs du Nord-Pas de Calais qui durera du 27 mai au 9 juin 1941, avant d’être sévèrement réprimée. En 1944, les rumeurs de débarquement et de retrait progressif des forces allemandes se répandent comme une traînée de poudre, les réseaux de résistance locaux étant en contact avec Londres. Galvanisés par ce nouvel espoir, ils s’associent : ce sont les Lillois eux-mêmes qui achèveront d’expulser de leurs terres l’occupant allemand en déroute. C’est-à-dire la charge symbolique de la visite de la reine d’Angleterre, et de sa présence dans un lieu de commémoration. Le public lillois réuni pour l’occasion n’a pas manqué de témoigner son affection et sa reconnaissance à la reine mécanique.

Après leur visite à Lille, Elizabeth II et son mari Philippe concluent leur voyage en France par une visite bien remplie d’une heure et demie à Roubaix. Ils sont accueillis par le maire en mairie et par « Vive la Reine ! » rythmé par la foule nombreuse massée sur la place.

La raison est moins chère : dans les années 1950, l’industrie textile était l’un des trois piliers économiques du pays et le Nord-Pas-de-Calais lui a valu le surnom d’« usine de France ». Roubaix est aussi appelée la « capitale mondiale de la laine » : l’industrie a plutôt bien survécu à la guerre et est à son apogée. La visite du couple royal est donc centrée sur la découverte des usines de la famille Prouvost, dont la fameuse Lainière de Roubaix. L’atelier se répète comme l’un des plus modernes au monde, notamment parce que la température y est régulée, ce qui améliore les conditions de travail. Il y a 350 ouvriers employés et 15% de la production totale de laine française y est filée chaque année, selon les rapports de l’époque.

Le bleu, connu pour être la couleur préférée de la reine, est à l’honneur dans les ateliers de la visite guidée. Jean Prouvost, fondateur et directeur de l’usine, avait déjà reconstruit une rue commerçante à l’intérieur de l’usine, pour permettre à Elizabeth II de faire ses emplettes parmi les produits locaux. Une médaille en argent doré, gravée des armoiries de la ville de Roubaix, a été créée spécialement pour commémorer la visite de la capitale du textile, et conservée dans les Collections Royales.