Devant huit élèves de troisième du collège Emile-Zola de Suresnes, Juliette, 24 ans, étudiante en médecine en 5e, ne mâche pas ses mots. Dans ses mains, elle tient une reproduction rose flashy de l’anatomie féminine. « Qu’est-ce que c’est, comment s’appelle-t-il ? », lance-t-il aux filles qui se taisent, n’osant pas prononcer le premier mot qui leur vient à l’esprit qui commence par la lettre « c ».
« Eh bien, c’est une vulve et oublions l’autre mot parce que la vulve est tellement plus jolie », a tout de suite lancé Juliette. « Et là, en haut, c’est le clitoris. On n’en voit qu’une petite partie, mais il mesure 12,5 cm avec des récepteurs de 10 000 kiff et c’est quand même super stylé », poursuit l’étudiant en médecine devant un public immédiatement captivé.
La jeune femme fait partie des recrues du département des Hauts-de-Seine, qui va visiter les 98 collèges du territoire dans le cadre de l’opération « Tous coquins ». Le point de départ : la lutte contre la précarité menstruelle, la distribution de culottes menstruelles lavables à toutes les collégiennes de la 5ème à la 3ème, lors d’un atelier de prévention.
« Un vide de la transmission dans les familles »
Sans tabous. « Les règles sont en moyenne 8 cl de sang en cinq jours, donc on se détend », résume l’étudiante, contournant alors les protections existantes, de la serviette à la serviette hygiénique en passant par la coupelle et la culotte lavable qui leur seront distribuées. .
« Cela fait trois ans que nous travaillons sur ce projet et c’est tellement important de parler à ces filles sans fossé générationnel. Là, elles ont l’impression de parler à leur grande sœur », sourit Bénédicte de Kerprigent, directrice des Hauts-de-France. -Seine Institute, qui porte ce projet pour le conseil départemental.
Il observe « qu’il y a parfois un trou de transmission dans les familles ». Selon les données de l’association Astrée et les questionnaires compilés dans le cadre des opérations Giga la Vie, 43% des jeunes de 12 à 16 ans éprouvent un réel sentiment de solitude et « ne peuvent pas compter sur leur famille, et bénéficient d’une éducation fiable et régulière ». , des informations médicales ou préventives », selon la communauté.
Pour trouver des culottes menstruelles pour collégiennes, Bénédicte de Kerprigent et son équipe ont cherché pendant des mois le bon fournisseur. « Si le marché a explosé ces dernières années, il ne s’agissait pas d’acheter du made in China ou des culottes synthétiques », insiste la réalisatrice. Il a donc opté pour la marque française Blooming, en coton, dont le modèle le moins cher est vendu 25,50 euros. Avec une première commande de 25 000 culottes cette année pour lancer l’opération.
Un budget de 635 000 euros sur deux ans
Le département des Hauts-de-Seine est le premier de la région à proposer un tel dispositif pour lutter contre l’insécurité menstruelle, malgré l’installation de distributeurs de protection menstruelle gratuits dans les lycées et certains collèges. « De nombreux établissements nous signalent des absences récurrentes de jeunes filles quelques jours par mois. C’est donc une des actions essentielles que nous pouvons mener en faveur de l’éducation nationale », souligne Nathalie Léandri, vice-présidente du conseil départemental en charge des collèges, ajoutant que le budget de l’opération est de 635.000 euros pour deux ans. .
Budget qui comprend des ateliers de prévention comme celui qui a eu lieu toute la matinée de lundi, à Suresnes. Le démarrage des 150 interventions prévues jusqu’à la fin de l’année scolaire. Un soutien fondamental pour les collégiennes, qui ont accès à beaucoup d’informations, sans toujours pouvoir les comprendre.
« Nous avons appris beaucoup de choses. Il nous a parlé sans tabous de sujets qu’on n’ose pas affronter en se mettant super à l’aise », analysent Aline et Léa, 14 ans et en 3e, après le bref quart d’heure passé avec Juliette, qui ont couvert en un temps record les sujets les plus importants de la puberté, des menstruations et de l’hygiène féminine.
Tout en distillant des messages bienveillants, décomplexés et souvent très drôles. « C’est super de pouvoir faire prendre conscience à ces filles de leur corps, c’est tellement important », sourit l’étudiante en médecine, qui suit les groupes avec la même énergie.