Le taux variable : un faux ennemi
Dans l’imaginaire collectif, ce taux n’a pas franchement bonne presse… Ce dont la mère de famille ne s’inquiète pas, disant à l’avenir de son enfant-emprunteur : « Surtout, n’emprunte pas à taux variable, ça te coûtera plus cher ! » À tout prix, vous devez emprunter à taux fixe. Mais alors d’où vient cette mauvaise réputation ? Ces taux seront-ils la solution pour « contourner l’usure » ? Quels sont les risques ? On se reparle ? Explication de Maël Bernier, directeur de la communication et porte-parole de Meilleurtaux.
Taux variables : un temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître…
Pour mémoire, entre 2000 et 2008, environ un tiers des prêts signés en France l’ont été à taux variables fermés. En 2022, ce niveau s’effondre à 5 %. Très peu de banques pratiquent aujourd’hui ce type de taux.
Quelle est la cause de cet effondrement ? Pour l’essentiel, la crise des subprimes aux États-Unis, qui a tout détruit sur son passage. Depuis la crise économique de 2008, un certain amalgame s’est opéré avec les produits américains liés aux coûts variables. Cet épisode catastrophique a ensuite rendu plus difficile leur commercialisation outre-Atlantique, même si elles n’avaient aucun rapport avec les produits français.
Entre 2008 et 2013, les banques françaises ont continué à proposer des produits à taux variable capé, mais ils ont eu tendance à se faire rares. Pendant ce temps, les spreads et les taux fixes ont considérablement baissé. En effet, il n’y a aucun intérêt à prendre le taux variable à 2,5% si le taux fixe est à 3%.
A partir de 2014, on assiste à la quasi-disparition des produits variables. Interrogé? Tarifs fixes plus bas. On considère que pour que le variable vaille le coût, il doit y avoir un écart d’au moins 70 points voire 100 points de base entre le fixe et le variable.
Illustration : Si le taux est fixé à 2,50 %, pour que le variable en vaille la peine, il doit être de 1,50 % ou 1,80 % max.
Taux variable : un moyen de contourner l’usure ?
Le taux d’attrition pour les prêts à taux fixe est de 3,05 %. Le taux d’usure pour la vitesse variable est de 2,92 %. Pour un prêt signé à un taux de base de 1,80 % au lieu de 2,40 %, l’emprunteur aura plus de chance de tout « coincer » (taux, assurance, garantie) entre 1,80 % et 2,92 %.
Ce n’est pas si simple. Les Français ne connaissent pas ces prêts et les jeunes banquiers non plus. Expliquer ce coût variable, demande beaucoup de pédagogie.
En quoi la France est-elle une exception concernant les taux variables ?
D’autres pays regardent plutôt la valeur des actifs, sans prêter une attention stricte aux critères d’endettement. Le problème, c’est qu’en cas de hausse des taux, les emprunteurs peuvent se retrouver contraints de vendre car ils n’ont plus les moyens de payer leurs mensualités non plafonnées. Dans ce cas, il est possible de revenir en remboursement de 1000€ à 1600€ par exemple ! Si les revenus n’augmentent pas, la catastrophe viendra ! Les propriétaires sont alors très souvent contraints de vendre.
Une telle situation généralisée peut entraîner une baisse importante du prix des pierres, car tout le monde vend en même temps ! C’est exactement ce qui s’est passé aux Etats-Unis, en Espagne et au Portugal en 2008 où nous étions ultra protégés. Cela explique en grande partie la sécurité du marché immobilier français par rapport à nos voisins européens. Avec cette sécurité, les prix ne s’effondreront pas car il n’y aura pas une offre importante de marchandises.
Lumière sur la BCE qui demande aux banques françaises de prêter à taux variables ? Alors pourquoi ?
En fait, il répartit le risque entre la banque et l’emprunteur. Si les banques françaises prêtent à taux fixe, ce sont elles qui prennent le risque en cas de hausse des taux. Evidemment, les taux montent mais ils ne peuvent pas les répercuter sur les emprunteurs qui ont signé un prêt à taux fixe. S’ils vendent du variable, il est mieux réparti. C’est simple.
« Jusqu’à présent, l’OAT 10 ans est à 2,45%, après être remontée à 2,83% il y a 10 jours. Espérons qu’il s’agisse d’un « vrai » assouplissement, l’Euribor 3 mois est à 1,89%… Il sera difficile de vendre des variables, si le spread continue à se refermer… », explique Maël Bernier, directeur de la communication et porte-parole de Meilleurtaux.
Taux variable/taux fixe quelles différences ?
Exemple : pour un prêt de 200 000 €, la mensualité de 1,85 % pendant 20 ans est de 998 €. Si le taux monte au maximum, donc jusqu’à 2,85%, la mensualité la plus élevée sera de 1094€, soit près de 100€ de plus. Cela signifie que lors de la signature de ce type de prêt, vous devez d’abord vérifier que les revenus de l’emprunteur peuvent absorber l’augmentation des mensualités tout en respectant les 35% d’endettement. C’est évidemment ce que font les banques françaises.