« On en découvre un peu chaque jour avec cette pandémie », explique Antoine Flahault, directeur de l’Institut de santé mondiale de la Faculté de médecine de Genève, en Suisse. Depuis quelques jours, une nouvelle forme du virus Covid fait son apparition chez les malades. En plus du rhume traditionnel, et de la fièvre qui engendre la fatigue, les patients souffrent désormais de troubles digestifs.
« En une soirée, j’ai eu trois patients dans mon cabinet qui se sont plaints de douleurs au ventre avant que je ne me rende compte qu’ils étaient positifs au Covid », raconte Jérôme Marty, président du syndicat Union. Français pour un médecin généraliste (Ufml) à Haute-Garadh.
Diarrhées, vomissements, maux de ventre, ces nouveaux symptômes sont dus à la nouvelle version BQ.1.1. Ce cousin d’Omicron est apparu il y a quelques semaines grâce à une sous-lignée de la version, et maintenant il s’attaque aux muqueuses intestinales. « Le virus se transforme tellement que cette nouvelle version pourrait s’attaquer au tissu gastrique. Cela est dû à la modification de la structure du virus », explique Yannick Simonin, virologue et maître de conférences à l’université de Montpellier.
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« Ce n’est pas tout à fait nouveau, rassure Antoine Flahault, au début de l’épidémie en 2020, certains patients avaient des troubles digestifs ». Mais Omicron et les versions BA.4 et BA.5, devenues majoritaires, ont renforcé les symptômes de toux, de perte d’odorat et de fatigue. « Aujourd’hui, certaines données suggèrent que les douleurs au ventre seraient le principal symptôme avec BQ1.1 », précise Yannick Simonin. « Certains patients ont encore des troubles ORL mais c’est marginal », précise le médecin généraliste.
Une confusion avec la gastro-entérite
Si ces nouveaux symptômes ne concernent pas le médecin, ils peuvent poser un problème majeur dans le suivi de l’épidémie. À l’approche de l’hiver et la propagation des virus va augmenter en raison de la baisse de la température, les médecins ont peur de la confusion avec la gastro-entérite. Avec des symptômes similaires, les patients auront moins de réticences à tester le Covid, pensant avoir une simple gastro. « Il faut être prudent », assure Jérôme Marty. « La perception de cette maladie peut être un problème dans le suivi de l’épidémie », estime Yannick Simonin.
« Beaucoup de personnes passent déjà sous le radar sans être testées, souligne Antoine Flahault. Il y a un risque que les gens attendent d’être testés à l’arrivée de syndromes respiratoires comme la toux et donc baissent leur vigilance dans les gestes barrières ». Selon le chercheur, ce phénomène déroutant pourrait favoriser la multiplication du virus.
D’autant que les cas en Europe et notamment en France se multiplient. Selon le site de surveillance variable Cov Spectrum, BQ1.1 représentait 6% des nouveaux cas de Covid détectés en France fin septembre. L’Ile-de-France compte même 11 % des cas détectés.
Pas d’inquiétude sur les traitements
Une augmentation ressentie par Jérôme Marty dans son cabinet. « Je vois de plus en plus de patients avec ces symptômes », dit-il. « Cela pourrait être important dans les semaines à venir. » De son côté, Yannick Simonin déclare que « le BQ1.1 a une tendance à la hausse. C’est la première fois depuis plusieurs semaines qu’une sous-variable augmente à ce point. Il faut la surveiller ».
En revanche, le médecin n’est pas concerné par le traitement de ces nouveaux symptômes, « les patients doivent généralement prendre les médicaments en cas de troubles digestifs », précise Jérôme Marty.
Pour lui, les gestes barrières et le port du masque restent l’arme la plus efficace pour éviter la contamination, même avec cette nouvelle mouture. « Ce changement se transmet toujours par les voies des aérosols », précise Antoine Flahault, « et on sait que la ventilation et le port du masque sont des moyens très efficaces pour éviter la contamination ».
« Assez peu de recul »
Et les nouveaux vaccins « bivalents » visant à protéger les variantes d’Omicron, BA.4 et BA.5, qui sont actuellement administrés dans le cadre de la nouvelle campagne de vaccination qui a débuté le 1er octobre, peuvent être un espoir pour combattre cette variante. « Les vaccins augmentent l’immunité. Et ils sont tous efficaces contre les formes sévères », rappelle l’expert.
« Jusqu’à présent, les vaccins bloquent les variants, reconnaît-il aussi Yannick Simonin. Concernant cette version, nous n’avons aucun signe de fuite qui montre qu’on peut avoir des formes graves malgré la vaccination, c’est encourageant », se réjouit-il.
Du côté de l’hôpital, c’est encore le point d’interrogation, « enfin, on a peu de recul sur cette version », estime Yannick Simonin. « On ne sait toujours pas si BQ.1 va provoquer plus d’hôpitaux ou pas », admet aussi Jérôme Marty. Tout comme sa vitesse de transmission, « c’est peut-être plus constructif qu’Omicron, on ne sait pas », résume Antoine Flahault. Les prochaines semaines devraient apporter des réponses aux chercheurs et aux médecins.
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