Réunis la semaine dernière à Suresnes, les membres du comité directeur du CNPA ESR – qui doit annoncer un changement de nom dans les jours à venir – ont réfléchi aux évolutions à venir du secteur de l’enseignement de la conduite. Son vice-président Lorenzo LEFEBVRE nous a accordé un entretien  dans lequel il détaille les pistes de travail et les grandes orientations sur lesquelles l’organisation professionnelle majoritaire va travailler en 2022. Notamment, sur le concept d’« auto-école responsable » et sa traduction concrète pour les écoles de conduite et leurs élèves.

[PermisMag] Bonjour Lorenzo, pouvez-vous nous en dire plus sur ce concept « d’auto-école responsable » sur lequel vous travaillez ?

[Lorenzo Lefebvre] Une « auto-école responsable » est avant tout une auto-école qui doit être inclusive et s’adresser à tous. Nous souhaitons mieux accompagner deux catégories d’étudiants : les seniors et les personnes à besoins spécifiques, qu’elles aient un handicap visible ou invisible (dyslexie, dyspraxie, personnes atteintes de surdité, etc.). Ces personnes n’ont pas encore suffisamment accès à la formation… ou aux examens.

Il y a quelques mois, lors du Congrès de Lille, le CNPA appelait les auto-écoles à « faire leur révolution ». Pensez-vous que la révolution est terminée ? Le plus dur est-il fait ?

Les auto-écoles locales sont la référence pour le grand public. Contrairement à ce que certains ont tenté de croire, ils sont et restent indispensables !

Ce statut leur donne une responsabilité. Les auto-écoles doivent réfléchir aux moyens d’améliorer encore la formation qu’elles proposent et d’accueillir le plus grand nombre de personnes, quelles que soient leurs difficultés (âge, handicap ou manque de moyens financiers).

Le maintien de la mobilité des seniors est un enjeu national majeur. L’auto-école locale est là pour ça ! On ne parle pas de simples remises à niveau ou de remise à niveau… Les permis de conduire doivent pouvoir aider les seniors à continuer à conduire. L’auto-école sait mesurer, ses professeurs connaissent l’environnement, ils peuvent poser un diagnostic et donner des conseils personnalisés.

Ce sujet est au centre et en 2022 le CNPA mènera une campagne nationale de communication sur la formation des seniors vis-à-vis des assureurs. De nombreuses auto-écoles locales accompagnent déjà ce public plus âgé, mais le public ne le connaît pas assez…

Loin d’être anecdotique, ce marché est plus important que celui des jeunes conducteurs. Les auto-écoles ne doivent pas se limiter à la formation initiale… elles doivent aller plus loin et former le conducteur tout au long de sa vie.

Quand on parle de « responsabilité » dans les médias, on pense souvent à la responsabilité sociale et environnementale. L’auto-école responsable est-elle une « auto-école verte » ?

Oui bien sûr ! Il existe de nombreuses façons de réduire notre impact environnemental.

Le CNPA réfléchit depuis plusieurs mois au verdissement du parc auto-école. Nous avons travaillé avec Bpifrance pour mettre en place des prêts pour acheter des voitures électriques. Nous attendons l’annonce officielle mais le dispositif est en place et sa mise en place est imminente. Ces prêts peuvent aller jusqu’à 75 000 € par structure. Ils devraient permettre l’achat de deux voitures électriques. Les premiers remboursements commencent 2 ans plus tard. Ce système a été négocié et obtenu par le CNPA pour toutes les auto-écoles.

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C’est un prêt qui doit être remboursé, mais il existe d’autres moyens d’améliorer le financement (aides régionales et départementales notamment). Le risque financier est limité.

Un dispositif similaire est mis en place par Bpifrance pour le financement des simulateurs de conduite. Dans le cas des simulateurs, le prêt est limité à 50 000 €, les remboursements ne démarrant qu’après un an.

Voitures électriques, simulateurs… Les auto-écoles se sont aussi digitalisées.

Absolument, quand on regarde en arrière sur 5-6 ans, on se rend compte que le chemin parcouru est énorme. Le mot « révolution » n’est pas une exagération. De nouveaux logiciels de gestion arrivent, de plus en plus d’auto-écoles ont un site internet, les simulateurs deviennent de plus en plus performants, les fiches de suivi se numérisent, des cours vidéo se sont mis en place en quelques semaines pour la limitation… La profession a décidé de se transformer. Quel métier en a fait autant ? Il n’y en a pas beaucoup…

Les plateformes ont-elles déclenché cette envie ? Peut-être, mais force est de constater que les auto-écoles ont su s’adapter et faire évoluer leur mode de fonctionnement. Ils ont adapté leur pédagogie numériquement et ce n’est pas fini. Il y aura encore des circonstances, on le sait, mais je suis confiant. Les auto-écoles s’adaptent !

Nous ne pouvons pas ne pas mentionner la question du « coût du permis de conduire ». Au CNPA, vous avez beaucoup réfléchi à la question du financement.

Le financement est un enjeu clé pour l’accès à la mobilité. On se rend compte aujourd’hui que le permis de conduire coûte plus cher aujourd’hui pour ceux qui ont le moins de moyens et cela, surtout parce qu’ils sont obligés de faire une formation fractionnée. Ce n’est pas normal! La mobilité est un droit universel – un besoin primordial – et chacun devrait avoir le droit de conduire quelle que soit sa situation.

Un jeune sans argent doit avoir des solutions. Les personnes qui en ont besoin doivent être dirigées vers l’aide. Les budgets sont là mais ils sont mal utilisés. Il faut avoir une discussion avec les pouvoirs publics.

Pour le CNPA, il existe deux solutions qui résolvent le problème d’accès au permis de conduire :

C’est un bon état d’esprit à avoir. De plus, ces formations financées doivent déboucher sur un permis de conduire. Il faut y réfléchir, l' »école de conduite responsable » doit accompagner ses élèves jusqu’au bout, jusqu’à l’obtention du permis.

2022 est une année d’élection présidentielle, avez-vous un message pour les candidats ?

Oui, nous demandons aux candidats de parler du permis de conduire. Comme je l’ai déjà dit, la mobilité est un besoin primordial pour 80% de la population française. On parle souvent d’envoyer de jeunes médecins dans des déserts médicaux pour exercer en milieu rural, à condition qu’ils aient une licence. Bien sûr, ce n’est qu’un exemple.

Nous souhaitons et ferons en sorte que la profession maintienne ce maillage territorial, que nous continuions à avoir une auto-école dans toutes les 2,8 communes. Nous sommes très fiers de ce chiffre et peu de magasins peuvent en dire autant !