L’emprunteur qui, sur les mauvais conseils de son banquier, souscrit une assurance invalidité inadaptée à ses besoins, doit être indemnisé plus facilement, vient de juger la Cour de cassation.

Publié le 28 nov. 2022 à 06:00 Mis à jour le 28 nov. 2022 à 06:01 Temps de lecture 2 min.

Lorsque les banquiers distribuent des assurances pour, par exemple, garantir des prêts, ils doivent, comme les assureurs, vérifier que le contrat qu’ils proposent à leur client est adapté à leurs besoins. S’ils lui font signer un contrat inadapté, lui doivent-ils une indemnisation ? C’est la question que pose le cas suivant.

En 2006, Mme X, sous-directrice en Suisse, contracte deux emprunts auprès de la Banque Populaire pour acheter une maison en France. La banque vous demande d’adhérer au groupe d’assurances que vous avez stipulé auprès d’Allianz Vie, sans attirer votre attention sur le fait que votre contrat ne garantira aucune interruption de travail liée à l’aggravation d’une maladie auto-immune (syndrome de Gougerot-Sjögren), pour qui la suit depuis 1991. Neuf ans plus tard, lorsque l’évolution de la maladie contraint Mme X à arrêter de travailler, Allianz refuse d’exercer sa garantie, invoquant la clause d’exclusion de son contrat.

Madame X assigne alors la Banque Populaire, afin qu’elle soit condamnée, pour « défaut de conseil », à lui verser 100 % de l’indemnité qui lui serait due par l’assureur. Afin de démontrer que la banque lui a fait « perdre une chance » d’être adéquatement indemnisée, elle doit, selon la jurisprudence traditionnelle, démontrer qu’une telle possibilité existait, à savoir : premièrement, il existait un contrat sur le marché pour couvrir son risque ; et que, d’autre part, mieux informée, elle l’aurait probablement adhéré, ayant alors les moyens de le faire, compte tenu de ses importants revenus de frontalière.

De 60 % à 0 %

Cependant, la Banque Populaire conteste sa première démonstration, selon laquelle le courtier BoursedesCredits aurait pu proposer un contrat convenable, moyennant une « surprime de 300% ». Le tribunal de grande instance de Lyon rend une sentence de Salomon : il dit que la faute de la banque doit être réparée par le paiement de 60% de l’indemnité convenue contractuellement. Mais la cour d’appel de Lyon, qui épouse le point de vue de la banque, exclut toute indemnisation.

Mme X a formé un pourvoi en cassation. Son avocat, Me Jean-Pierre Ghestin, plaide alors que la perte de chance doit « ouvrir droit à indemnisation, sans que l’emprunteur ait à démontrer que, mieux informé et conseillé, il aurait souscrit d’une certaine manière une assurance pour garantir le risque accompli ». Il invoque deux arrêts récents, qui ont censuré l’exigence traditionnelle de la double preuve.

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L’arrêt 18-25.440 du 20 mai 2020, publié au « Bulletin des condamnations de la chambre civile », vise la première démonstration : il censure une décision de la cour d’appel de Lyon, selon laquelle l’assuré, victime d’un accident sur le travail, « n’a pas [démontré] que, pleinement informé, il aurait pu souscrire une autre police d’assurance qui l’aurait couvert contre l’incapacité de travail ».

L’arrêt 19-24.467 du 27 juin 2021 vise la seconde manifestation. Il critique un arrêt de la cour d’appel de Montpellier, selon lequel l’assuré, agriculteur souffrant de lombalgies – maladie exclue de son contrat -, « n’a [démontré] pas qu’il aurait accepté de payer nécessairement plus cher assurance, si le banquier avait donné un avertissement de plus ». Aucune de ces deux affaires n’a encore été réexaminée par les juridictions de renvoi.

Le 15 septembre 2022, (21-13.670, arrêt également publié au « Bulletin des Sentences de la Chambre Civile »), à la surprise de nombreux juristes, la Cour de cassation tranche en sa faveur : elle annule l’arrêt d’appel et renvoie les parties devant le tribunal autrement composé de Lyon, pour qu’il rejuge l’affaire. Le pourcentage d’indemnité qu’il retiendra (90% ou 5%) permettra de vérifier si la justice entend vraiment mieux sanctionner le prêteur fautif.

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