C’est une association généralement tacite mais influente dans le petit monde du végétarisme. L’Association végétarienne française (AVF) traverse sa période la plus douloureuse depuis sa création « à la fin du siècle dernier », comme elle l’indique sur son site internet.

A son actif, quelque 3 000 adhérents, des fédérations régionales, une petite équipe de salariés et de belles réussites associatives, comme cette bataille gagnée et consacrée par la loi Egalim de 2018 sur l’obligation de proposer des repas végétariens hebdomadaires dans les cantines scolaires. Voilà pour le look épuré de l’AVF. Côté cuisine interne, c’est autre chose : départs chaotiques, arrêts de travail, burn-out, licenciement pour faute grave ou incapacité après avis de la médecine du travail constatant l’impossibilité pour certains salariés de reprendre le travail au sein de la structure. …

De nombreux anciens salariés, d’autres encore en poste, mais aussi d’anciens membres du conseil d’administration de l’association, témoignent de l’inconfort de travailler dans une structure associative. Le malaise que certains disent perdure.

Pas de viande, mais des salariés sur le gril

Les tensions au sein de l’AVF se sont accumulées depuis des années, depuis le premier mandat de la présidente Élodie Vieille-Blanchard en 2013, selon une demi-douzaine de témoignages recueillis par Charlie, mais ont culminé en 2021.

A ce moment, Coralie*, chef de la division Végécantines, tape du pied sur l’assiette et se plaint de la plaque qui ne dit pas son nom. Sa colère correspond à son engagement envers la cause. Il ne comptait pas les heures et faisait ses dossiers à fond. Il a mené la campagne gagnante de la loi sur le climat de 2021 qui a introduit des options végétariennes quotidiennes dans les cantines publiques. Mais, d’un tempérament quelque peu intact, il serait aussi vite ému par les nombreux arrêts maladie de ses camarades. Comme beaucoup d’autres, il dépeint une atmosphère toxique mais, contrairement à d’autres, parle ouvertement et librement à sa direction. A partir de là, sa vie professionnelle est devenue intenable. « C’est une descente aux enfers. J’ai été extraite des dossiers que je suivais tant j’ai travaillé dur depuis le début de mon arrivée à l’association en 2020. Les échanges par e-mail sont devenus de plus en plus difficiles avec Élodie la présidente. Je me réserve le droit de recadrer l’entretien avec des intimidations et des menaces de licenciement. Ensuite, j’ai été complètement ignoré et la seule réponse que j’ai obtenue a été que tout était de ma faute », a-t-il déclaré. Une question qui, a encore dit la jeune femme, pèse sur les liens de confiance nécessaires au travail. Lien qu’il a voulu récupérer en sollicitant à trois reprises une médiation.

Certes, les cas ne sont pas isolés et les groupes de travail vivent régulièrement les mêmes relations abusives et insatisfaisantes. Mais ce qui surprend ici, c’est le nombre de salariés qui souffrent, la cohérence de leurs propos quel que soit leur poste ou leur ancienneté dans l’association, qu’ils se connaissent ou non.

Sans surprise, Élodie Vieille-Blanchard, présidente de l’AVF, estime que ces tensions font partie de la relation par excellence au monde du travail. Il a nié toutes les plaintes formulées par ses anciens employés, sans remettre en cause sa façon de gérer. Pourtant, tant de jeunes talents, engagés, passionnés de travailler pour un objectif commun, abandonnent si souvent et ont rapidement de quoi se remettre en question.

Dans des cas comme celui-ci qui affectent le monde du travail, souvent les paroles de l’employé contredisent les paroles de l’employeur. Cependant, le grand nombre de témoignages décrivant la gestion des poisons est susceptible de constituer une preuve significative d’un problème structurel de la FAV.

« L’AVF, une fois dedans c’est l’enfer ! »

Sarah Bienaimé était l’une des rares employées à avoir accepté de témoigner en public. Arrivée à l’ONG parallèlement à la nomination d’Élodie Vieille-Blanchard comme présidente de l’AVF, elle a exercé les fonctions de « chargée de développement » puis de « chargée de plaidoyer ». Un travail qui consiste à « créer un contexte favorable aux causes végétariennes dans certaines lois », autrement dit du lobbying mais version ONG. Il l’a coaché ​​avec enthousiasme, d’abord en 2014 : « A l’époque, j’étais freelance mais j’ai remarqué que ça ne fonctionnait pas en interne et j’avoue, un peu gêné, que je n’avais pas vraiment envie de rentrer dans ce qui se passait. sur. » . permanente. « 

Tout a changé lorsque Sarah a signé un contrat permanent à temps partiel quatre ans plus tard. « Comme beaucoup d’ONG, AVF emploie des personnes très engagées qui se donnent à fond, mais c’est au responsable de se fixer des limites et de ne pas toujours demander plus. Les charges de travail peuvent être énormes : semaines de 50 à 70 heures pour certaines personnes, soirées, week-ends. , il n’y a plus de barrière entre le temps personnel et le temps professionnel. Ça fatigue les salariés, ils s’affolent. Le surmenage crée inévitablement des conflits dus à un burn-out extrême. Résultat pour Sarah : un burn-out sévère en octobre 2019 qui l’empêchera de travailler pendant un an et un demi. » L’AVF est une association très attractive pour les jeunes hauts potentiels qui croient en ce qu’ils font, puis une fois dedans, c’est l’enfer. J’aime mon travail mais ici je suis brisé. « Avec beaucoup de travail, mais aussi – surtout ? – par la direction du département. « Nous sommes une association qui parle de vertu, qui travaille pour le bien-être animal, respecte la planète, mais traite ses salariés comme le font les entreprises du CAC 40 », poursuit Sarah Bienaimé, qui se dit aussi « profondément honteuse de la culture de l’affichette qui règne ». chez AVF. Une pratique difficile à prouver, contrairement à la charge de travail excessive, mais très efficace pour faire sortir les gens. »

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Très critique, mais Sarah Bienaimé a tenu à nuancer ses propos. « Certains des salariés qui se disent aujourd’hui heureux dans l’association sont sans doute sincères, mais cela ne discrédite en rien le témoignage de dizaines de personnes qui affirment qu’il y a de la souffrance au travail. Par ailleurs, Sarah reconnaît volontiers le rôle important joué par Élodie Vieille-Blanchard dans la professionnalisation de l’AVF, la sortant de l’amateurisme. « Actuellement, il y a une dizaine d’employés et AVF a du poids dans les affaires politiques, mais cela se fait au détriment d’un management préhistorique ! Et de certaines cochonneries humaines. » atmosphère instable, ou d’avoir été expulsé pour des raisons qui ne sont pas claires. C’est par exemple le cas d’un comptable, qui a été licencié pour faute grave à cause de deux chèques d’un montant ridicule de 40 et 17 euros. C’est vrai qu’il a aussi fait les malchanceux rapports financiers 2021 pour plaire au président car les conclusions tirées par les comptables ont été désastreuses sur la situation AVF.

Salariés et bénévoles : qui fait quoi ? Qui sait quoi ?

Un autre point important est la coordination réalisée par association entre les salariés d’AVF et les membres bénévoles du conseil d’administration. Si la cohabitation entre professionnels et militants fait partie du charme – souvent compliqué – de la structure associative, il semble qu’une grande partie de la tension au sein de l’AVF se soit cristallisée au sein même du Conseil. La démission de nombreux membres, dont Dalibor Frioux. Auteur, professeur de philosophie, collaborateur au think tank Terra Nova, il n’a vécu à AVF qu’un an, a déclaré dans un mail que CA brouille les rôles et concurrence ses propres salariés ! Idem pour Sébastien Demange qui désigne plus directement Élodie Vieille-Blanchard comme la responsable de l’association dysfonctionnelle. Ce médecin généraliste, membre de la Commission Santé Nutrition d’AVF, est devenu membre du Conseil d’Administration en 2018 et supervise le pôle Végécantines. A l’autre bout du dossier, il y a d’abord Sarah, puis, pendant son long arrêt maladie, Coralie, sa mère porteuse, dont la direction va bientôt s’en vouloir. « Quand Élodie, la présidente, est revenue de sa retraite spirituelle – elle est bouddhiste, notent les éditeurs –, elle a remarqué que la division Végécantines s’était énormément développée. Il a tout de suite décidé de le reprendre et de le faire sans hésiter sur notre travail, nos dossiers, que nous avons tous très mal vécus », se souvient le praticien. Il fermera ses portes en 2021, un an avant la fin de son mandat car « la situation est intenable. » encore ». Juste avant, le médecin dont elle s’était inquiétée avec le nombre impressionnant d’arrêts de travail dans une si petite structure. Pourtant, « lorsque j’ai parlé à Élodie de l’inconfort de l’employée au travail, elle a automatiquement mis en cause la faiblesse psychologique de la personne et m’a dit qu’elle avait il a contacté son ancien employeur pour confirmer. Malgré le fait que la pratique ressemble au coping, elle n’est pas très crédible. employeur précédent ils ont à peine le temps de mettre à jour le dossier de santé de leur ancien employé ! Nous n’avons pas pu poser toutes les questions que nous voulions au président, qui a brusquement mis fin à l’appel, considérant les questions de Charlie comme « atténuantes », avant de raccrocher et de ne plus répondre à nos demandes répétées par e-mail. Or Élodie Vieille-Blanchard a déclaré avoir été « victime d’une sorte de cabale » et « d’une recherche de vengeance extraordinaire » à son encontre, de la part de plusieurs licenciés. Sa meilleure défense est attaquée, il poursuit pour diffamation et dénonciation calomnieuse de pages Facebook qu’il a récemment créées et dans lesquelles se sont exprimés d’anciens salariés. Il a également envoyé, par l’intermédiaire de son cabinet d’avocats, une lettre recommandée notifiant à Coralie « de cesser toutes les expressions publiques et gratuites mettant en cause la véracité de l’AVF et de ses représentants légaux » et a porté plainte contre elle en lien avec l’envoi de courriers électroniques à tous les groupes AVF locaux. .

Laisser tomber le climatiseur pour certains, s’accrocher au fauteuil pour d’autres. Les stratégies diffèrent mais toutes jurent, de tout cœur, d’œuvrer pour le bien et la survie d’une association actuellement en ébullition et avec laquelle certaines ONG environnementales et bestiales ont commencé à prendre leurs distances.

Alors que l’AG approche là où les enjeux comptent, renouveler ou non la présidence d’Élodie Vieille-Blanchard, c’est la fin du démontage public. Le linge sale sera lavé à huis clos de l’association. L’inspection du travail a été saisie et mise en examen, les Prud’hommes ont également dû faire face à des licenciements… Autant dire que ce qui risque d’exploser lors de l’AG du samedi 26 novembre n’est peut-être que le début de l’affaire AVF. ●

* Le prénom a été modifié à la demande de la personne concernée.